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J.-P. Mas (EdV) redoute le retour à un nouvel élitisme du voyage 🔑

Interview de Jean-Pierre Mas, le président des EDV


Près d'une centaine de professionnels sont réunis à Québec, à l'occasion de la convention des Entreprises du Voyage Île-de-France. Si le maître de cérémonie a fait la part belle à la destination, les agents de voyages ont aussi été invités à des moments de réflexion autour de l'avenir de l'industrie. L'évènement a fait l'objet d'une prise de parole de Jean-Pierre Mas. Pour le président des Entreprises du Voyage, l'industrie doit s'alerter d'une baisse durable du nombre de voyageurs et d'une industrie qui recule vers un certain élitisme. Nous avons approfondi le sujet, avec Jean-Pierre Mas, entre une balade dans Québec et un repas chaleureux dans une cabane à sucre.


Rédigé par le Lundi 17 Octobre 2022

Jean-Pierre Mas (EDV) craint que le voyage n'aille vers un certain élitisme : "C’est ce qui est en train de se passer" - crédit JDL
Jean-Pierre Mas (EDV) craint que le voyage n'aille vers un certain élitisme : "C’est ce qui est en train de se passer" - crédit JDL
TourMaG.com - D’après les derniers chiffres des Entreprises du Voyage (EDV), le recul du nombre de dossiers se poursuit pour les réservations entre décembre à mars 2023. Il s’établit à hauteur de -26%. Est-ce une source d’inquiétude ?

Jean-Pierre Mas :
Les réservations sont beaucoup plus tardives, le volume d’affaires va retrouver des niveaux normaux. Par contre dans le même temps, le nombre de dossiers sera toujours en recul par rapport à la période.

La perte de clients est un motif d’inquiétude. Le volume d’affaires en progression est peut-être lié au phénomène du revenge travel, le fait qu’une partie de la clientèle avait de l’argent à dépenser.

En revanche, nous devons nous préoccuper du nombre de clients qui a diminué, cela s’explique par le fait qu'une frange de notre clientèle qui a disparu.

Soit ils ne passent plus par notre intermédiaire, soit ils ne partent plus.


TourMaG.com - Vous estimez la baisse du nombre de clients à -26% à l’heure actuelle. Les ventes de dernière minute vont-elles permettre de réduire grandement ce recul ?

Jean-Pierre Mas :
Je pense que nous allons terminer pour cette période avec un volume d’affaires en hausse par rapport à 2019.

En revanche, la baisse du nombre de clients s’inscrit dans le marbre. Autant pour l’économie immédiate des entreprises ce n’est pas grave, car les recettes font la richesse, autant pour la vision à moyen et long terme, c’est un gros sujet d’inquiétude.


"Nous allons vers une baisse de la fréquence des voyages"

TourMaG.com - Avez-vous une explication sur cette baisse durable ? L’explication est-elle à chercher du côté de l’inflation ou de la fermeture pendant deux ans des agences de voyages ?

Jean-Pierre Mas
: Globalement, ce n’est pas la fermeture des agences durant le Covid qui explique ce phénomène. Par contre, celles qui sont toujours fermées, elles ne le savent pas, mais elles ont disparu.

Il y a eu un retour vers l’intermédiation, du fait des difficultés que les clients ont connues durant la crise sanitaire. Nous les avons beaucoup aidés durant cette période.

Il y a une chose que je n’ai pas dite, mais la durée des voyages a augmenté d’une grosse demi-journée. C’est une bonne nouvelle, mais cela peut aussi vouloir dire peut-être dire que leur fréquence sera moindre.

Nous nous retrouvons avec un voyage plus cher, plus long, monté en gamme, mais moins fréquent. C’est une partie de l’explication.


L’autre partie peut se chercher aussi dans le fait qu’un segment de la population que nous ne voyons pas en agence de voyages a décidé de ne pas voyager ou différemment, du fait de l’impact du voyage sur le réchauffement climatique.

Cet impact a été très perceptible cet été.

Nous nous apercevons que nous sommes en train de changer de monde, dans le sillage de la crise énergétique. Ce changement peut inciter les gens à modifier leur approche du voyage.


TourMaG.com - Comment est-il possible de lutter contre ce phénomène ?

Jean-Pierre Mas :
Lutter contre, je n’ai pas cette ambition. Pour agir, il faut redonner l’accessibilité au voyage à des populations qui s’en sont éloignées pour des raisons économiques.

Autant nous pouvons maitriser le voyage, autant nous n'avons pas de prise sur la situation économique, l’inflation et le pouvoir d’achat...

Nous devons prendre des positions en matière de réduction de l’impact climatique du voyage. Cela doit être au cœur de nos préoccupations.

Vers un élitisme du voyage ? "C'est ce qui est en train de se passer"

TourMaG.com - Pensez-vous que l’industrie peut revenir en arrière, en étant réservée à une élite ?

Jean-Pierre Mas :
C’est une crainte, car c’est ce qui est en train de se passer.

Avec le risque de taxation du voyage pour des raisons écologiques, nous risquons d’accélérer le processus. C’est contraire au sens de l’Histoire.

Le voyage est la contrepartie du temps libre, de l’augmentation de la durée de la vie et de la réduction du temps de travail. Ce serait une régression, si nous faisions ça.


TourMaG.com - Il y a une montée en gamme à tous les niveaux, même des acteurs du tourisme social. Où se situe le niveau d’intervention ? Au niveau de l’Etat ou des acteurs privés ?

Jean-Pierre Mas :
L’Etat a une mission en matière de tourisme social, de maintenir les organismes, c’est une mission régalienne.

Pour notre activité, ce n’est pas à l’Etat d’investir. Par contre, sa capacité d’intervention pourrait être l’option facile de la taxation, pour inciter à moins voyager.

L’option portée à l’époque par Barbara Pompili, pour réduire la contribution de l’activité à l’impact climatique estimé autour de 3%, c’est antidémocratique et contraire au sens de l’Histoire.

Le voyage est un droit qui résulte de conquêtes sociales. Nous ne sommes plus au XIXe siècle, une époque où le voyage était réservé aux riches, aux seules personnes qui avaient les moyens économiques et intellectuels.


TourMaG.com - Pour vous, la hausse des prix de l’aérien et de l’inflation en général, ce sont des poids pour l’avenir de la démocratisation du voyage ?

Jean-Pierre Mas :
Bien sûr, l’inflation va réduire l’accès aux vacances.

Dans beaucoup de familles, un arbitrage sera fait au détriment des vacances de manière à pouvoir maintenir un niveau de vie correct.

"Il sera plus compliqué de passer le mur des PGE en 2023"

TourMaG.com - Les conflits sociaux ont-ils un impact sur les réservations ?

Jean-Pierre Mas :
Durant les conflits sociaux des derniers jours, nous constatons une absence de prise de décision concernant les voyages.

Aujourd’hui, les Français sont préoccupés par leur plein d’essence.


Une partie de la population a peur, une autre espère que le climat social se dégrade, cela n’incite guère à prendre des décisions pour partir en vacances.

Nous le ressentons clairement en ce moment.


TourMaG.com - Dans nos colonnes, Thierry Million, le Directeur des études d'Altares, alerte sur le risque accru de défaillances en 2023, causées par une dégradation de la situation économique. Est-ce que cela vous préoccupe ?

Jean-Pierre Mas :
L’accélérateur des défaillances ne va pas spécialement concerner notre secteur, mais plutôt celui des entreprises qui produisent.

Notamment celles qui utilisent des produits en dollar et venant de loin, risquent de vivre une pénurie. Ce seront les premières à subir le contexte économique mondial.

Notre industrie sera moins touchée. Notre problématique sera celle des remboursements des PGE, pour laquelle le gouvernement nous a garanti un accompagnement au cas par cas.

A ce jour, les quelques défaillances que nous avons eues ne sont pas liées au PGE, mais plutôt à des situations détériorées avant la crise sanitaire.

Par contre en 2023, nous aurons la problématique des échéances des PGE.


TourMaG.com - Le fameux mur de la dette dont vous parlez depuis quelques mois, arrivera donc l’année prochaine ?

Jean-Pierre Mas :
Nous avons bien passé le mur du remboursement des avoirs, ce sera plus compliqué pour celui des PGE.

D’après les enquêtes que nous avons faites auprès de nos adhérents, les difficultés de remboursement vont concerner 10% des acteurs ayant souscrit un PGE.


Pour les 90% restants, ils ont les capacités pour faire face. Nous avons seulement 6 mois de remboursement, ce n’est rien et cela va s’étaler sur encore 4 ans.

Minima sociaux : "Ce n'est pas dit que les patrons du tourisme accorderont une telle hausse à l'avenir"

TourMaG.com - Au gré de vos interventions, vous appuyez de plus en plus sur l’environnement. Est-ce parce que le message n’imprime pas chez tous les professionnels du tourisme ?

Jean-Pierre Mas :
Il y a des niveaux de réactions et de culture très très disparates au sein des adhérents.

Vous avez des gens très impliqués, d’autres qui y réfléchissent beaucoup. Et quelques autres disent que cela ne les concerne pas, ce n’est pas leur problème.

Cette attitude ne pourra pas durer. Elle ne sera pas acceptée par l’opinion publique.


TourMaG.com - Durant la pandémie, une partie des professionnels espérait entrer dans une nouvelle ère, un nouveau voyage. Pas mal de personnes se sont moquées de cette position et finalement le monde d’après est bien différent. Le durable n’est plus une option...

Jean-Pierre Mas :
Sur ce point, nous avons encore plus de preuves sur la partie voyage d’affaires, c’est déjà beaucoup plus perceptible que dans le loisir.

Dans le business travel, les décisions impliquant le collectif et les signaux vont clairement vers une branche du voyage qui ne retrouvera jamais ses chiffres d’avant.

Ce monde d’après est plus difficilement quantifiable chez les particuliers, car ce sont des décisions individuelles.

Avec l’allongement de la durée des séjours, les recettes supérieures et le moindre nombre de clients, ces signaux démontrent peut-être une diminution de la fréquence.


TourMaG.com - Le secteur se dirige vers des années moins fastueuses...

Jean-Pierre Mas :
Nous avons quelques soucis pour les 2 ou 3 ans à venir, notamment sur l’écologie. Nous sommes également la cible privilégiée et facile des ayatollahs de la décroissance.

TourMaG.com - L’intersyndicale en a remis une petite couche sur les négociations annuelles. Êtes-vous prêts à rouvrir les négociations ?

Jean-Pierre Mas :
Nous voulons moderniser le calcul de l’ancienneté et non le remettre en cause.

Nous aimerions qu’il ne soit plus corrélé mathématiquement et automatique au salaire minimum de chaque groupe. Nous n’avons pas dit que nous voulions la baisse de la prime d’ancienneté.

La décorrélation nous amènera à une discussion sur l’ensemble de la politique salariale. Après nous n’avons pas la capacité à négocier une hausse généralisée de l’ensemble des salaires de la profession. Nous fixons seulement les minima sociaux.

Il n’y aura pas de négociations cette année. Nous avions donné aux syndicats un ultimatum, ils ont choisi de ne pas accepter. Nous nous reverrons en 2023.

Si nous ne sommes pas allés au-delà du SMIC c’est de la faute des syndicats. La hausse de 7,15% en moyenne, ça ne s’était jamais fait, c’était même colossal et cela faisait l’objet d’une concertation pas évidente avec les patrons du tourisme.

Il n’est pas dit que nous retrouvions une telle hausse dans les prochaines négociations...

Romain Pommier Publié par Romain Pommier Journaliste - TourMaG.com
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