P. Boyer (Terra Gaïa) : « Nous entrons dans une période instable, il faut s'adapter » [ABO]

Terra Group n’est plus. Le réseau de réceptifs s’est scindé en deux entités : Terra Gaïa et Terra Panamerica.

Pour comprendre cette scission, il faut revenir sur son histoire.

En 1999, Fabrice Pawlak et Pierre Boyer créent Terra Andina, une agence réceptive implantée en Bolivie. Ils proposent alors des expéditions en 4x4 dans les Andes.

L’agence péruvienne ouvre en 2001. Ensemble ils développent une offre en Amérique latine. Les agences se multiplient : Pérou, Argentine, Brésil, Mexique, Costa Rica…

« On avait deux petites boîtes, une à Lima, l'autre à La Paz, et on faisait des combinés Pérou-Bolivie avec des extensions sur le lac.

En 2003, Fabrice est parti monter une agence au Brésil, c’est le début du réseau. Le modèle Terra, c’est aussi l'intégration de gens qui viennent de l'extérieur, qui partagent nos valeurs, qui étaient intéressés par notre système et qui prenaient des responsabilités dans l'entreprise en devenant associés », raconte Pierre Boyer, co-fondateur de Terra Group et Terra Gaïa.

En pleine expansion, le Groupe a besoin de se structurer et devient en 2006 Terra Group.

Les besoins des agences Terra grandissent de jour en jour. Fabrice Pawlak, associé fondateur de Terra Group et ingénieur de formation, créé un outil tout-en-un.

« Toogonet est une boîte à part qui a été développée pour répondre aux besoins de Terra Group, mais ouvert aux autres réceptifs. Nous avons notre propre logiciel qui nous permet d’être performants au niveau technologique et réactifs sur la conception des voyages et la réalisation de devis clients. C’est un super truc en ligne que les agences elles-mêmes peuvent modifier », explique Pierre Boyer.

L’écosystème s’agrandit en 2016 avec la naissance de Togezer. Le réseau mondial de réceptifs indépendants est créé par Fabrice Pawlak et Thomas Loubert.

La croissance du Groupe Terra se poursuit, jusqu'en 2020 et l’arrivée du Covid-19.

« Depuis 2020, nous avons traversé plusieurs crises, internes et externes : un débat difficile sur la crise écologique, sur la nécessité et l’urgence, ou pas, de faire autrement. Le Covid a failli avoir raison de nous et nous a obligés à explorer collectivement et individuellement d’autres horizons.

Il a mis en lumière des désaccords internes et intenses sur nos communs et sur nos objectifs. Bref, nous en sommes sortis transformés. Et nous avons entamé notre déconstruction, puis notre reconstruction », précise les équipes dans un communiqué de presse.

La scission est actée. « Cela correspond également à un moment où une nouvelle génération a émergé, en accord avec ce principe : être durable et rentable, les deux à la fois, lucide quant au fait qu’il n’existe pas de mode d’emploi.

Nous avons décidé d’explorer la 3e voie : celle du vivant. C’est ainsi que des cendres de Terra Group est né Terra Gaïa en 2024. »

De son côté, Terra Panamerica conserve les agences Terra Canada & Alaska, Terra Maya (spécialiste du Mexique), Terra Guatemala (spécialiste Guatemala et Bélize), Terra Nicaragua, Terra Caribea (spécialiste Costa Rica et du Panama) et Terra Colombia.

Terra Gaïa garde 11 agences Terra Gaïa Altiplano & Terra Gaïa Argentina en Argentine, Terra Gaïa Australia, Terra Gaïa Balka, Terra Gaïa Bolivia, Terra Gaïa Chile, Terra Gaïa Ecuador, Terra Gaïa Morocco, Terra Gaïa Brazil, Terra Gaïa Peru.

La nouvelle entité se positionne comme « le pionnier d’un nouveau concept de voyage : une aventure au cœur du vivant. »

Après un an et demi de travail, les agences Terra Gaïa renouvellent leur production. Fini le « Pérou Express » en dix jours et neuf nuits ou encore les connexions en avion.

« Chez Terra Gaïa, nous sommes convaincus que nous devons évoluer. Nous sommes obligés de faire avec ces contraintes climatiques, politiques... Nous entrons dans une période instable, il faut s'adapter.

Nous ne pouvons pas faire comme si rien ne se passait. Rationnellement, on s’est dit qu’on ne voulait pas emmener notre boîte dans cette direction. Nous voulons être responsable, par rapport aux gens qui travaillent chez nous, on doit être porteur de projets plus durables et rentables pour durer », affirme Pierre Boyer.

Pour ce faire Terra Gaïa lance une nouvelle collection : « Les voyages extraordinaires ».

« Ce sont des voyages de groupes d’une durée entre 20 et 30 jours, qu'on ne trouvera jamais ailleurs. Les départs se font à date fixe, parce que ça correspond à un événement, à une fête dans le pays », explique Pierre Boyer.

Terra Gaïa travaille essentiellement en B2B, via les agences francophones et des plateformes telles qu’Evaneos. Grâce à ses sites implantés dans chaque pays, le réseau touche une clientèle B2C.

« Il est très difficile financièrement d'exister en B2C. Nous n'avons pas de moyens, nous n'avons pas levé d'argent. Nous sommes une boîte familiale », rappelle Pierre Boyer.

Une difficulté pour le réceptif. Le déploiement de l’intelligence artificielle en est une autre.

« On peut imaginer demain que les gens pourront faire leurs propres circuits chez eux, en appuyant sur un bouton. Chat GPT, DeepSeek et compagnie vont proposer aux gens de faire leurs propres réservations », anticipe Pierre Boyer, qui pour autant se veut rassurant. « Aujourd’hui, notre existence n'est pas menacée, parce que nos destinations sont compliquées. »