Les salariés d'Air Austral risquent de ne pas avoir trop le choix, le mariage avec Corsair est imposé par Bercy - Depositphotos @fergregory
C'est le grand sujet des derniers jours dans l'océan Indien.
Je ne parle pas de la pandémie qui refait la une des journaux, mais bel et bien d'Air Austral.
Après les sorties médiatiques punchy de la nouvelle présidente de région au cœur de l'été, sur le mariage forcé entre la compagnie de la Réunion et Corsair, c'est aux salariés d'agiter le chiffon rouge... ou blanc.
Dimanche 14 novembre 2021, les employés d'Air Austral se rassemblaient pour reprendre sur les pavés la contestation de Huguette Bello
"Les salariés sont inquiets.
Nous souhaitons plus de visibilité sur le rapprochement. Autant la direction nous parle sur l'aspect économique, mais ne nous dit mot sur l'aspect social," nous confiait alors Frédéric Benard, délégué syndical CFDT chez Air Austral.
Le brouillard se lève de plus en plus sur les hauteurs du Piton de la Fournaise.
Je ne parle pas de la pandémie qui refait la une des journaux, mais bel et bien d'Air Austral.
Après les sorties médiatiques punchy de la nouvelle présidente de région au cœur de l'été, sur le mariage forcé entre la compagnie de la Réunion et Corsair, c'est aux salariés d'agiter le chiffon rouge... ou blanc.
Dimanche 14 novembre 2021, les employés d'Air Austral se rassemblaient pour reprendre sur les pavés la contestation de Huguette Bello
"Les salariés sont inquiets.
Nous souhaitons plus de visibilité sur le rapprochement. Autant la direction nous parle sur l'aspect économique, mais ne nous dit mot sur l'aspect social," nous confiait alors Frédéric Benard, délégué syndical CFDT chez Air Austral.
Le brouillard se lève de plus en plus sur les hauteurs du Piton de la Fournaise.
Air Austral affiche des pertes de 220 millions d'euros
Et oui, si le mariage fait des vagues depuis quelques semaines, l'idée aurait pris de l'épaisseur ces dernières heures.
"Ça s'accélère," lâche un autre délégué syndical exaspéré de la situation.
La coopération commerciale imaginée à la fin du mois d'août sous la forme d'une joint-venture, avec Corsair ne serait plus le scénario privilégié à Sainte-Marie de la Réunion.
Le mariage deviendrait presque obligatoire. Au vu des chiffres affichés par Air Austral, il ne fait pas de doute qu'il y a urgence.
Pour remettre dans le contexte, l'entreprise a réalisé sur son dernier bilan comptable publié et arrêté le 30 mars 2020, un chiffre d'affaires net de 413 millions d'euros, pour une perte de 8,6 millions d'euros.
Un exercice encore peu impacté par la crise.
Selon le journal l'Eco Austral, la compagnie aurait perdu entre mars 2020 et mars 2021 plus 76 millions d’euros. Dans le même temps, les revenus ont fondu de 55%.
L'urgence est réelle. Le trou serait bien pire.
"Ce n'est que la partie émergée de l'iceberg, car nous avons les pertes cumulées, les avions que nous n'avons pas terminé de payer, etc.
Pour faire tourner la compagnie, il faut entre 10 et 12 millions par mois, sauf qu'en même temps, les restrictions aux voyages sont lourdes," se désole Marie-Noëlle Wolff, déléguée syndicale UNSA Air Austral.
La dette dépasserait, selon les chiffres communiqués lors du dernier CSE, les 220 millions d'euros. Un montant global qui court sur les 5 ans à venir.
Dans cette ligne comptable se trouvent les PGE (près de 100 millions), les moratoires de dettes publiques et celles gelées.
"Ça s'accélère," lâche un autre délégué syndical exaspéré de la situation.
La coopération commerciale imaginée à la fin du mois d'août sous la forme d'une joint-venture, avec Corsair ne serait plus le scénario privilégié à Sainte-Marie de la Réunion.
Le mariage deviendrait presque obligatoire. Au vu des chiffres affichés par Air Austral, il ne fait pas de doute qu'il y a urgence.
Pour remettre dans le contexte, l'entreprise a réalisé sur son dernier bilan comptable publié et arrêté le 30 mars 2020, un chiffre d'affaires net de 413 millions d'euros, pour une perte de 8,6 millions d'euros.
Un exercice encore peu impacté par la crise.
Selon le journal l'Eco Austral, la compagnie aurait perdu entre mars 2020 et mars 2021 plus 76 millions d’euros. Dans le même temps, les revenus ont fondu de 55%.
L'urgence est réelle. Le trou serait bien pire.
"Ce n'est que la partie émergée de l'iceberg, car nous avons les pertes cumulées, les avions que nous n'avons pas terminé de payer, etc.
Pour faire tourner la compagnie, il faut entre 10 et 12 millions par mois, sauf qu'en même temps, les restrictions aux voyages sont lourdes," se désole Marie-Noëlle Wolff, déléguée syndicale UNSA Air Austral.
La dette dépasserait, selon les chiffres communiqués lors du dernier CSE, les 220 millions d'euros. Un montant global qui court sur les 5 ans à venir.
Dans cette ligne comptable se trouvent les PGE (près de 100 millions), les moratoires de dettes publiques et celles gelées.
Les pistes du CIRI pour sauver Air Austral !
La direction n'a pas caché qu'une restructuration financière est inévitable.
Les employés demandent un apurement de la dette, mais ce n'est pas du goût d'Air Austral, ni de Bercy pour le moment.
"Il nous a été dit qu'il ne nous restait plus que 3 mois de trésorerie. Cette échéance prend fin dans quelques semaines, fin décembre ce sera la catastrophe !
Dans le même temps, les ventes ne repartent pas," déplore Marie-Noëlle Wolff.
Le 1er novembre dernier, le projet de joint-venture a été présenté aux représentants des salariés, mais ce n'est pas tout.
Les pistes de réflexion du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) l'ont été aussi. Elles se basent sur une étude réalisée par PWC, pour sauver la compagnie.
Le dossier comporte 3 axes stratégiques qui vont bien au-delà de la simple coopération commerciale.
Le premier concerne la mise en place de code-share avec Corsair, mais chaque entité reste indépendante, avec un gain annuel de 30 millions par compagnie.
Des discussions sur un partage de code sont engagées en ce moment même, en attendant la joint-venture. Cette dernière est dans l'attente d'une décision au niveau européen.
Le deuxième axe serait la mise en commun de la flotte, pour une économie annuelle de l'ordre de 40 à 50 millions pour les deux transporteurs. Ce choix impliquerait un impact sur le personnel.
Et pour finir, le 3e volet serait la fusion totale entre Corsair et Air Austral.
"Il y aurait alors la mise en commun de toute l'activité. Le gain sera de 50 à 70 millions d'euros par an, avec les conséquences que vous savez sur l'emploi.
La direction nous dit que le rapprochement avec Corsair est l'unique projet," analyse Frédéric Bénard.
Depuis les sons de cloches ont quelque peu changé, mais pas la conclusion.
Le cabinet du préfet de la Réunion reconnait bien qu'il existerait d'autres pistes, mais la seule option viable resterait celle menant à la fusion avec la compagnie antillaise.
Les employés demandent un apurement de la dette, mais ce n'est pas du goût d'Air Austral, ni de Bercy pour le moment.
"Il nous a été dit qu'il ne nous restait plus que 3 mois de trésorerie. Cette échéance prend fin dans quelques semaines, fin décembre ce sera la catastrophe !
Dans le même temps, les ventes ne repartent pas," déplore Marie-Noëlle Wolff.
Le 1er novembre dernier, le projet de joint-venture a été présenté aux représentants des salariés, mais ce n'est pas tout.
Les pistes de réflexion du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI) l'ont été aussi. Elles se basent sur une étude réalisée par PWC, pour sauver la compagnie.
Le dossier comporte 3 axes stratégiques qui vont bien au-delà de la simple coopération commerciale.
Le premier concerne la mise en place de code-share avec Corsair, mais chaque entité reste indépendante, avec un gain annuel de 30 millions par compagnie.
Des discussions sur un partage de code sont engagées en ce moment même, en attendant la joint-venture. Cette dernière est dans l'attente d'une décision au niveau européen.
Le deuxième axe serait la mise en commun de la flotte, pour une économie annuelle de l'ordre de 40 à 50 millions pour les deux transporteurs. Ce choix impliquerait un impact sur le personnel.
Et pour finir, le 3e volet serait la fusion totale entre Corsair et Air Austral.
"Il y aurait alors la mise en commun de toute l'activité. Le gain sera de 50 à 70 millions d'euros par an, avec les conséquences que vous savez sur l'emploi.
La direction nous dit que le rapprochement avec Corsair est l'unique projet," analyse Frédéric Bénard.
Depuis les sons de cloches ont quelque peu changé, mais pas la conclusion.
Le cabinet du préfet de la Réunion reconnait bien qu'il existerait d'autres pistes, mais la seule option viable resterait celle menant à la fusion avec la compagnie antillaise.
Certares nie fermement tout intérêt pour Air Austral
De l'autre côté du globe, c'est silence radio.
Personne ne veut s'exprimer, même si Pascal de Izaguirre et Laurent Abitbol sont actuellement à la Réunion. Officiellement, ils y sont non pas pour traiter le cas d'Air Austral, mais pour un Comex du groupe... Marietton.
Le PDG du transporteur serait sur l'île intense en tant qu'invité au même titre que d'autres participants.
Malgré tout, des négociations ont lieu à Paris et elles se feront sans Certares, contrairement à ce qu'a pu écrire un confrère en mal d'information.
"Bien que nous ayons investi dans le secteur aéronautique en Amérique du Sud, l'aérien n'est pas au sommet de nos priorités. Nous n'avons pas de velléité immédiate sur ce secteur.
Pour Air Austral, nous avons connaissance qu'il y a actuellement des discussions, mais, à ce stade, cette opportunité n’est pas étudiée par notre société," nous explique un responsable du private equity.
Le dossier aurait été très rapidement refermé par Certares et serait mené par l'actionnariat de Corsair, avec l'appui du patron de Marietton. Ce dernier le ferait donc sans les ressources de son fonds d'investissement.
Corsair demanderait à l'Etat de passer l'éponge sur les dettes, à la faveur d'un chèque tournant autour des 200 millions d'euros. De quoi permettre à Air Austral de repartir sur de bonnes bases.
Et pour retomber sur ses pattes, la nouvelle entité devra se délester de quelques salariés.
"Pour la 1ère fois, lors du dernier CSE, il a été question non pas d'un plan social, mais d'un calibrage d'effectif.
En réunissant les deux effectifs, donc 1 800 salariés, entre 30 et une centaine de salariés pourraient être débarqués," précise un représentant du personnel.
En attendant, il convient pour le transporteur réunionnais de survivre dans un contexte sanitaire de plus en plus incertain, et alors que l'horloge tourne vite, très vite.
Personne ne veut s'exprimer, même si Pascal de Izaguirre et Laurent Abitbol sont actuellement à la Réunion. Officiellement, ils y sont non pas pour traiter le cas d'Air Austral, mais pour un Comex du groupe... Marietton.
Le PDG du transporteur serait sur l'île intense en tant qu'invité au même titre que d'autres participants.
Malgré tout, des négociations ont lieu à Paris et elles se feront sans Certares, contrairement à ce qu'a pu écrire un confrère en mal d'information.
"Bien que nous ayons investi dans le secteur aéronautique en Amérique du Sud, l'aérien n'est pas au sommet de nos priorités. Nous n'avons pas de velléité immédiate sur ce secteur.
Pour Air Austral, nous avons connaissance qu'il y a actuellement des discussions, mais, à ce stade, cette opportunité n’est pas étudiée par notre société," nous explique un responsable du private equity.
Le dossier aurait été très rapidement refermé par Certares et serait mené par l'actionnariat de Corsair, avec l'appui du patron de Marietton. Ce dernier le ferait donc sans les ressources de son fonds d'investissement.
Corsair demanderait à l'Etat de passer l'éponge sur les dettes, à la faveur d'un chèque tournant autour des 200 millions d'euros. De quoi permettre à Air Austral de repartir sur de bonnes bases.
Et pour retomber sur ses pattes, la nouvelle entité devra se délester de quelques salariés.
"Pour la 1ère fois, lors du dernier CSE, il a été question non pas d'un plan social, mais d'un calibrage d'effectif.
En réunissant les deux effectifs, donc 1 800 salariés, entre 30 et une centaine de salariés pourraient être débarqués," précise un représentant du personnel.
En attendant, il convient pour le transporteur réunionnais de survivre dans un contexte sanitaire de plus en plus incertain, et alors que l'horloge tourne vite, très vite.
L'avis du SNPL de Corsair sur la possible fusion avec Air Austral
Et malgré l'échéance fatidique de décembre, le cabinet du préfet de la Réunion est venu apporter des garanties.
"Pour notre interlocuteur, il est hors de question que fin décembre, nous n'ayons pas trouvé de solution viable. Nous ne savons pas s'il dit ça pour pas mettre le feu aux poudres.
Après si nous n'avons plus de trésorerie, c'est aussi parce que nous n'arrivons pas à vendre de billets d'avion," Marie-Noëlle Wolff, déléguée syndicale UNSA Air Austral.
Alors que du côté de Maurice, la situation se dégrade et laisse craindre le pire pour les fêtes de fin d'année,, Madagascar restreint aussi le nombre de vols à 2 par compagnie et pour l'Afrique du Sud, "mais nous attendons d'un instant à l'autre qu'ils referment" poursuit la syndicaliste.
Des perspectives peu réjouissantes.
Et en parlant de projections, les salariés ne sont pas contre la fusion avec Corsair, mais souhaitent tout simplement de la transparence de leur direction.
Dans l'Océan Atlantique règne un certain calme, voire même un enthousiasme, à l'idée du rapprochement.
"J'observe qu'il y a une volonté étatique de renforcer les compagnies aériennes françaises. Cette alliance irait dans le bon sens.
De plus, elle permettrait de maintenir l'entité réunionnaise et antillaise," espère Nicolas Pradeilles, le président SNPL ALPA de Corsair.
Pour l'heure, en Guadeloupe aucune présentation de la fusion n'a été faite aux salariés. Des interrogations demeurent. Pour le représentant du personnel, le rapprochement ne ferait pas tâche entre deux entreprises ayant des valeurs et des produits communs.
De plus, ce pourrait être une bonne opportunité pour Corsair, non seulement de diversifier ses routes, mais aussi pour passer outre les restrictions européennes.
Si bien sûr, l'action va au-delà de la simple coopération commerciale.
"Bruxelles a bloqué notre flotte à 9 appareils au moins jusqu'en 2023, dans le cadre des aides accordées par l'Etat. Selon nous, l’avantage essentiel de la joint-venture réside dans la fait de créer un groupe de taille cohérente avec ceux de la concurrence" poursuit Nicolas Pradeilles.
C'est aussi l'opportunité de limiter le risque sur les Antilles en diversifiant les routes sur l'océan Indien.
N'oublions pas non plus que dans quelques mois des élections présidentielles auront lieu. Il y a donc fort à parier que, viable ou non, Air Austral trouvera une solution.
"Pour notre interlocuteur, il est hors de question que fin décembre, nous n'ayons pas trouvé de solution viable. Nous ne savons pas s'il dit ça pour pas mettre le feu aux poudres.
Après si nous n'avons plus de trésorerie, c'est aussi parce que nous n'arrivons pas à vendre de billets d'avion," Marie-Noëlle Wolff, déléguée syndicale UNSA Air Austral.
Alors que du côté de Maurice, la situation se dégrade et laisse craindre le pire pour les fêtes de fin d'année,, Madagascar restreint aussi le nombre de vols à 2 par compagnie et pour l'Afrique du Sud, "mais nous attendons d'un instant à l'autre qu'ils referment" poursuit la syndicaliste.
Des perspectives peu réjouissantes.
Et en parlant de projections, les salariés ne sont pas contre la fusion avec Corsair, mais souhaitent tout simplement de la transparence de leur direction.
Dans l'Océan Atlantique règne un certain calme, voire même un enthousiasme, à l'idée du rapprochement.
"J'observe qu'il y a une volonté étatique de renforcer les compagnies aériennes françaises. Cette alliance irait dans le bon sens.
De plus, elle permettrait de maintenir l'entité réunionnaise et antillaise," espère Nicolas Pradeilles, le président SNPL ALPA de Corsair.
Pour l'heure, en Guadeloupe aucune présentation de la fusion n'a été faite aux salariés. Des interrogations demeurent. Pour le représentant du personnel, le rapprochement ne ferait pas tâche entre deux entreprises ayant des valeurs et des produits communs.
De plus, ce pourrait être une bonne opportunité pour Corsair, non seulement de diversifier ses routes, mais aussi pour passer outre les restrictions européennes.
Si bien sûr, l'action va au-delà de la simple coopération commerciale.
"Bruxelles a bloqué notre flotte à 9 appareils au moins jusqu'en 2023, dans le cadre des aides accordées par l'Etat. Selon nous, l’avantage essentiel de la joint-venture réside dans la fait de créer un groupe de taille cohérente avec ceux de la concurrence" poursuit Nicolas Pradeilles.
C'est aussi l'opportunité de limiter le risque sur les Antilles en diversifiant les routes sur l'océan Indien.
N'oublions pas non plus que dans quelques mois des élections présidentielles auront lieu. Il y a donc fort à parier que, viable ou non, Air Austral trouvera une solution.