"Dans l'ensemble le discours d'Emmanuel Macron sur la fin de l'abondance est très dangereux. Il y a un danger social et sociétal," selon Marc Touati - Depositphotos @robzs
TourMaG.com - Dans une 1ère interview, vous parliez d'une inflation record depuis les années 80. Bruno Le Maire a récemment annoncé que la hausse des prix ne devrait pas s'améliorer avant début 2023. Comment remedier à cette inflation et baisse de l'euro ?
Marc Touati : Elle risque de continuer.
Je ne parlerai pas d'entrer dans une politique d'austérité, mais plutôt pragmatique. Nous avons la chance de vivre en France, un pays où 32% des dépenses sont sociales, nous sommes les leaders mondiaux. C'est magnifique.
Les Français sont bien protégés, mais cela a un coût. Face à l'inflation, nous devrions plutôt baisser les charges qui pèsent sur les salaires, afin d'augmenter les revenus des Français, sans faire peser ce poids sur les entreprises.
Un mécanisme qui entraînerait une baisse des recettes fiscales, donc moins d'argent dans les caisses de l'Etat. Nous devrions alors réduire nos dépenses. Il faut du sérieux budgétaire et du courage.
Il faut un discours de vérité.
Marc Touati : Elle risque de continuer.
Je ne parlerai pas d'entrer dans une politique d'austérité, mais plutôt pragmatique. Nous avons la chance de vivre en France, un pays où 32% des dépenses sont sociales, nous sommes les leaders mondiaux. C'est magnifique.
Les Français sont bien protégés, mais cela a un coût. Face à l'inflation, nous devrions plutôt baisser les charges qui pèsent sur les salaires, afin d'augmenter les revenus des Français, sans faire peser ce poids sur les entreprises.
Un mécanisme qui entraînerait une baisse des recettes fiscales, donc moins d'argent dans les caisses de l'Etat. Nous devrions alors réduire nos dépenses. Il faut du sérieux budgétaire et du courage.
Il faut un discours de vérité.
"Comment sommes-nous passés des 30 glorieuses à la fin de l'abondance ?"
TourMaG.com - Pourtant Emmanuel Macron a eu un discours de vérité, si je peux le qualifier comme cela. Il a parlé de la fin de l'abondance, des évidences et de l'insouciance...
Marc Touati : Ce qui est surprenant, c'est que le président de la République donne l'impression de découvrir la situation dans laquelle se trouve le pays.
C'est incroyable, nous parlons du président. Il y a encore quelques mois Bruno Le Maire (Ministre de l'économie ndlr) nous expliquait que nous étions à la veille de nouvelles 30 glorieuses.
Comment pouvons-nous passer en si peu de temps des 30 glorieuses à la fin de l'abondance ? Dans l'ensemble son discours est très dangereux. Il y a un danger social et sociétal.
J'ai été encore plus choqué, par d'autres propos tenus par le président. Dire aux Français que nous ne pouvons plus avancer sur l'innovation est horrible. Je ne comprends pas comment il a pu dire ça.
TourMaG.com - Dans l'ensemble la culture générale des Français sur l'économie est relativement anecdotique. Ne faudrait-il pas améliorer ce point, notamment chez nos politiques ?
Marc Touati : C'est une certitude.
Par exemple, la FED a annoncé s'être trompée et devoir relever les taux d'intérêt, tout en arrêtant la planche à billets.
La population américaine a très bien compris ça, nous au même moment la BCE dit le contraire. Nous n'avons aucune culture économique, surtout en France.
Marc Touati : Ce qui est surprenant, c'est que le président de la République donne l'impression de découvrir la situation dans laquelle se trouve le pays.
C'est incroyable, nous parlons du président. Il y a encore quelques mois Bruno Le Maire (Ministre de l'économie ndlr) nous expliquait que nous étions à la veille de nouvelles 30 glorieuses.
Comment pouvons-nous passer en si peu de temps des 30 glorieuses à la fin de l'abondance ? Dans l'ensemble son discours est très dangereux. Il y a un danger social et sociétal.
J'ai été encore plus choqué, par d'autres propos tenus par le président. Dire aux Français que nous ne pouvons plus avancer sur l'innovation est horrible. Je ne comprends pas comment il a pu dire ça.
TourMaG.com - Dans l'ensemble la culture générale des Français sur l'économie est relativement anecdotique. Ne faudrait-il pas améliorer ce point, notamment chez nos politiques ?
Marc Touati : C'est une certitude.
Par exemple, la FED a annoncé s'être trompée et devoir relever les taux d'intérêt, tout en arrêtant la planche à billets.
La population américaine a très bien compris ça, nous au même moment la BCE dit le contraire. Nous n'avons aucune culture économique, surtout en France.
"Le quoi qu'il en coûte a été une erreur stratégique" selon Marc Touati
TourMaG.com - Selon vous, quelles seraient les conséquences de ce chemin de la facilité ?
Marc Touati : Les Français ont besoin de perspectives. Nous avons voulu mettre à genoux la Russie, maintenant, c'est nous qui sommes à terre.
Quant au début de l'année, la BCE, la Banque de France ou Bruno Le Maire annonçaient que l'inflation ne serait que transitoire, voilà où nous en sommes aujourd'hui. Ce n'est pas sérieux.
Il n'est pas possible de leur dire serrez-vous la ceinture et nous verrons bien, où cela nous mène. Ce n'est pas acceptable. Nous devons donner au pays une porte de sortie.
Ma grande crainte étant qu'un jour où l'autre faisant face à un mur, l'Etat puise dans le patrimoine des Français.
TourMaG.com - Pour rejoindre vos propos, le gouvernement a mis en place des ristournes pour boucher les trous dans les portefeuilles des Français, avec des aides carburants. Ne faudrait-il pas avoir un nouveau récit commun, plutôt que de continuer avec cette vision court-termiste ?.
Marc Touati : Toutes ces mesures sont court-termistes.
La politique du "quoi qu'il en coûte" a coûté très cher.
C'était une erreur stratégique. Autant au printemps 2020, c'était normal, mais une fois que nous sommes entrés dans une certaine normalisation, nous aurions dû arrêter.
Marc Touati : Les Français ont besoin de perspectives. Nous avons voulu mettre à genoux la Russie, maintenant, c'est nous qui sommes à terre.
Quant au début de l'année, la BCE, la Banque de France ou Bruno Le Maire annonçaient que l'inflation ne serait que transitoire, voilà où nous en sommes aujourd'hui. Ce n'est pas sérieux.
Il n'est pas possible de leur dire serrez-vous la ceinture et nous verrons bien, où cela nous mène. Ce n'est pas acceptable. Nous devons donner au pays une porte de sortie.
Ma grande crainte étant qu'un jour où l'autre faisant face à un mur, l'Etat puise dans le patrimoine des Français.
TourMaG.com - Pour rejoindre vos propos, le gouvernement a mis en place des ristournes pour boucher les trous dans les portefeuilles des Français, avec des aides carburants. Ne faudrait-il pas avoir un nouveau récit commun, plutôt que de continuer avec cette vision court-termiste ?.
Marc Touati : Toutes ces mesures sont court-termistes.
La politique du "quoi qu'il en coûte" a coûté très cher.
C'était une erreur stratégique. Autant au printemps 2020, c'était normal, mais une fois que nous sommes entrés dans une certaine normalisation, nous aurions dû arrêter.
"La Grèce ne devrait plus être dans la zone euro"
Autant l'inflation conjoncturelle est vouée à baisser, à cause de la récession, mais nous devons nous habituer à une inflation durable." selon Marc Touati - DR
TourMaG.com - D'ailleurs la dette de la France va se rapprocher des 120% du PIB. Allons-nous pouvoir la rembourser un jour ?
Marc Touati : Nous allons bientôt avoir 3 000 milliards d'euros de dettes publiques.
Heureusement, nous ne la rembourserons pas en une seule fois, ce qui compte, c'est d'au moins rembourser les intérêts chaque année.
Il y a une notion importante dans votre question, c'est la soutenabilité de la dette. Cet endettement génère-t-il assez de croissance pour au moins rembourser ses intérêts ? Depuis 2007, la France n'a jamais eu assez de croissance pour rembourser juste les intérêts.
Même avec des taux à 0%, elle doit continuer à s'endetter. Nous n'y arrivons pas et maintenant que les taux d'intérêt augmentent... la situation se corse.
Le scénario est compliqué. Nous payons juste les erreurs de nos dirigeants, pas seulement d'Emmanuel Macron. Les Français ont été déresponsabilisés, en disant que cette dette n'était pas grave.
Le focus va se porter dans un 1er temps sur la Grèce, l'Italie, le Portugal, puis la France arrive tout juste derrière. Nous sommes dans le top 5 des pays les plus endettés de la zone euro.
TourMaG.com - Vous parlez de la Grèce, un pays sous tutelle du FMI. Malgré tout, le pays revient dans l'oeil du cyclone, comment est-ce possible ?
Marc Touati : Le problème de la Grèce : le pays ne devrait plus être dans la zone euro.
C'est trop couteux pour elle. Les Grecs ont dû faire des efforts importants, mais le PIB est inférieur de 27% à celui de 2008. C'est inadmissible pour les Grecs de vivre avec la richesse de 1998.
Si vous enlevez le tourisme, l'économie est relativement faible. Ce n'est pas tout, les Italiens sont aussi en grande souffrance. Le PIB est au niveau de 2 000. Nous parlons de situations catastrophiques.
Je suis un peu inquiet. L'une des grandes conséquences du coronavirus, étant que l'échelle des valeurs est tombée. La valeur travail, de responsabilité, de l'argent, etc.
Nous devons reconstruire et non détruire, cette échelle des valeurs.
Marc Touati : Nous allons bientôt avoir 3 000 milliards d'euros de dettes publiques.
Heureusement, nous ne la rembourserons pas en une seule fois, ce qui compte, c'est d'au moins rembourser les intérêts chaque année.
Il y a une notion importante dans votre question, c'est la soutenabilité de la dette. Cet endettement génère-t-il assez de croissance pour au moins rembourser ses intérêts ? Depuis 2007, la France n'a jamais eu assez de croissance pour rembourser juste les intérêts.
Même avec des taux à 0%, elle doit continuer à s'endetter. Nous n'y arrivons pas et maintenant que les taux d'intérêt augmentent... la situation se corse.
Le scénario est compliqué. Nous payons juste les erreurs de nos dirigeants, pas seulement d'Emmanuel Macron. Les Français ont été déresponsabilisés, en disant que cette dette n'était pas grave.
Le focus va se porter dans un 1er temps sur la Grèce, l'Italie, le Portugal, puis la France arrive tout juste derrière. Nous sommes dans le top 5 des pays les plus endettés de la zone euro.
TourMaG.com - Vous parlez de la Grèce, un pays sous tutelle du FMI. Malgré tout, le pays revient dans l'oeil du cyclone, comment est-ce possible ?
Marc Touati : Le problème de la Grèce : le pays ne devrait plus être dans la zone euro.
C'est trop couteux pour elle. Les Grecs ont dû faire des efforts importants, mais le PIB est inférieur de 27% à celui de 2008. C'est inadmissible pour les Grecs de vivre avec la richesse de 1998.
Si vous enlevez le tourisme, l'économie est relativement faible. Ce n'est pas tout, les Italiens sont aussi en grande souffrance. Le PIB est au niveau de 2 000. Nous parlons de situations catastrophiques.
Je suis un peu inquiet. L'une des grandes conséquences du coronavirus, étant que l'échelle des valeurs est tombée. La valeur travail, de responsabilité, de l'argent, etc.
Nous devons reconstruire et non détruire, cette échelle des valeurs.
Récession et inflation : "Un scénario assez dramatique" estime Marc Touati
TourMaG.com - Nous avions échangé peu après le début de la guerre en Ukraine, à l'époque, les économistes craignaient la stagflation. Nous sommes passés au stade au-dessus avec la récession-flation...
Marc Touati : La stagflation englobe aussi la récession, cela conjugue un ralentissement de la croissance ou récession et de l'inflation. Nous sommes en plein dedans.
C'est un scénario assez dramatique, car nous n'avons plus de cartouches pour y répondre.
Les pays développés ne se sont pas adaptés et les pays émergents sont les maitres du monde.
TourMaG.com - Pour terminer, pensez-vous que l'inflation peut continuer ?
Marc Touati : Il y a une inflation conjoncturelle, liée à une baisse de l'activité, donc une demande inférieure à l'offre. C'est la porte de sortie après une phase de forte inflation.
Il est inévitable que la hausse des prix s'estompe, mais pas que les prix baissent. Vous avez aussi une inflation structurelle provenant du développement durable, des nouvelles normes écologiques, etc.
Ainsi, l'inflation conjoncturelle est vouée à baisser, à cause de la récession, mais nous devons nous habituer à une inflation durable.
Marc Touati : La stagflation englobe aussi la récession, cela conjugue un ralentissement de la croissance ou récession et de l'inflation. Nous sommes en plein dedans.
C'est un scénario assez dramatique, car nous n'avons plus de cartouches pour y répondre.
Les pays développés ne se sont pas adaptés et les pays émergents sont les maitres du monde.
TourMaG.com - Pour terminer, pensez-vous que l'inflation peut continuer ?
Marc Touati : Il y a une inflation conjoncturelle, liée à une baisse de l'activité, donc une demande inférieure à l'offre. C'est la porte de sortie après une phase de forte inflation.
Il est inévitable que la hausse des prix s'estompe, mais pas que les prix baissent. Vous avez aussi une inflation structurelle provenant du développement durable, des nouvelles normes écologiques, etc.
Ainsi, l'inflation conjoncturelle est vouée à baisser, à cause de la récession, mais nous devons nous habituer à une inflation durable.
Biographie de Marc Touati :
Marc Touati est le fondateur du cabinet ACDEFI. Un cabinet de conseil et de formation économique et financier indépendant au service des entreprises et des professionnels.
ACDEFI possède un catalogue composé de plus de 1 500 clients.
Il est aussi un économiste reconnu pour ses ouvrages, dont quelques best sellers dans le domaine, dont "Le dictionnaire terrifiant de la dette" en 2013, réédité et passé en édition poche en 2015, puis "Guérir la France La thérapie de choc" en 2015, qui a reçu le "Prix du livre d’actualité 2015" décerné par le Cercle de l’Excellence RH.
Marc Touati anime aussi une chaine Youtube de vulgarisation des sujets économiques.
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ACDEFI possède un catalogue composé de plus de 1 500 clients.
Il est aussi un économiste reconnu pour ses ouvrages, dont quelques best sellers dans le domaine, dont "Le dictionnaire terrifiant de la dette" en 2013, réédité et passé en édition poche en 2015, puis "Guérir la France La thérapie de choc" en 2015, qui a reçu le "Prix du livre d’actualité 2015" décerné par le Cercle de l’Excellence RH.
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