Si des actionnaires et le repreneur ont pu récupérer de l'argent sur la procédure, pourquoi les créanciers ne pourraient-ils pas bénéficier - même partiellement - de cette même opportunité ? - DR : DepositPhotos.com, JanPietruszka
Sept ans jour pour jour après la liquidation judiciaire de Fram*, les langues se délient peu à peu du côté de Toulouse.
Le voyagiste, fondé en 1949 par Philippe Polderman, a marqué les mémoires. Il a aussi laissé un goût amer pour un certain nombre d'anciens salariés, qui considéraient Fram comme une deuxième famille.
Ceux repris par Voyages Invest / Phoenix (LBO France) ont vécu un changement brutal des méthodes de gestion et de management.
Dénonciation des avantages, arrêt du versement au budget des œuvres sociales au comité d'entreprise (CE), mise en place des suivis de performance commerciale (SPC), fermetures d'agences (Perpignan, Tournefeuille, Créteil), changement des régimes de mutuelle et de prévoyance, vente du plateau de billetterie Fram Affaires, mais aussi de la société Fram Nature...
A suivi la réorganisation de Plein Vent qui a abouti au licenciement de la quasi-totalité des effectifs.
Et tout ceci avant le rachat, en 2018, du Groupe par le fonds d'investissement Equistone, propriétaire à 90% du Groupe (mais aussi à 100% de Karavel/Promovacances).
Il fallait sauver le soldat Fram et le plan de sauvetage a fait des victimes. Entre la nouvelle direction, menée par Alain de Mendonça, et les élus du personnel, les échanges ont fait des étincelles.
En 2022, après des années de combat, « notre entreprise va dégager à nouveau des bénéfices opérationnels en 2022 », nous confie Alain de Mendonça. Mais nous y reviendrons dans un prochain article.
* et ses filiales Voyages Fram, Fram Agences, Fram Nature, Plein Vent
Le voyagiste, fondé en 1949 par Philippe Polderman, a marqué les mémoires. Il a aussi laissé un goût amer pour un certain nombre d'anciens salariés, qui considéraient Fram comme une deuxième famille.
Ceux repris par Voyages Invest / Phoenix (LBO France) ont vécu un changement brutal des méthodes de gestion et de management.
Dénonciation des avantages, arrêt du versement au budget des œuvres sociales au comité d'entreprise (CE), mise en place des suivis de performance commerciale (SPC), fermetures d'agences (Perpignan, Tournefeuille, Créteil), changement des régimes de mutuelle et de prévoyance, vente du plateau de billetterie Fram Affaires, mais aussi de la société Fram Nature...
A suivi la réorganisation de Plein Vent qui a abouti au licenciement de la quasi-totalité des effectifs.
Et tout ceci avant le rachat, en 2018, du Groupe par le fonds d'investissement Equistone, propriétaire à 90% du Groupe (mais aussi à 100% de Karavel/Promovacances).
Il fallait sauver le soldat Fram et le plan de sauvetage a fait des victimes. Entre la nouvelle direction, menée par Alain de Mendonça, et les élus du personnel, les échanges ont fait des étincelles.
En 2022, après des années de combat, « notre entreprise va dégager à nouveau des bénéfices opérationnels en 2022 », nous confie Alain de Mendonça. Mais nous y reviendrons dans un prochain article.
* et ses filiales Voyages Fram, Fram Agences, Fram Nature, Plein Vent
Quand les salariés tentaient de sauver un maximum de postes
Pour les salariés de l'ancien Fram, laissés sur le carreau, la situation n'a pas été pas simple non plus.
Michèle Przybysz, qui a passé 38 ans chez Voyages Fram, faisait partie des instances représentatives du personnel (IRP).
Avant la date fatidique du 25 novembre 2015, jour où le Tribunal de Commerce de Toulouse a prononcé la liquidation du Groupe, elle avait déjà passé quelques nuits blanches à tenter de sauver un maximum de postes, alors que les potentiels repreneurs peaufinaient leurs offres, dans le cadre du dispositif de « prépack cession ».
« Nous n’avions au CE qu’un rôle consultatif dans les diverses démarches de nos dirigeants visant à redresser l’entreprise. De plus, le dispositif de prépack cession, cette sorte de prêt-à-vendre mis en place par le conciliateur, rendait la marge de manœuvre très étroite, se souvient-elle.
Nous disposions de peu de temps et devions étudier dans l’urgence, parfois de nuit, les propositions des candidats à la reprise, certaines étant survenues en dernière minute.
Sans parler du temps perdu durant le feuilleton chinois HNA… Nous nous sommes attachés prioritairement à faire réduire le nombre global de licenciements, en pressant aussi les décideurs - en vain, malheureusement - d’inclure dans le périmètre de cession nos collègues des filiales à l’étranger ». On connaît désormais leur sort...
LIRE AUSSI : FRAM : les filiales étrangères ne savent pas à quelle sauce elles seront mangées...
Michèle Przybysz, qui a passé 38 ans chez Voyages Fram, faisait partie des instances représentatives du personnel (IRP).
Avant la date fatidique du 25 novembre 2015, jour où le Tribunal de Commerce de Toulouse a prononcé la liquidation du Groupe, elle avait déjà passé quelques nuits blanches à tenter de sauver un maximum de postes, alors que les potentiels repreneurs peaufinaient leurs offres, dans le cadre du dispositif de « prépack cession ».
« Nous n’avions au CE qu’un rôle consultatif dans les diverses démarches de nos dirigeants visant à redresser l’entreprise. De plus, le dispositif de prépack cession, cette sorte de prêt-à-vendre mis en place par le conciliateur, rendait la marge de manœuvre très étroite, se souvient-elle.
Nous disposions de peu de temps et devions étudier dans l’urgence, parfois de nuit, les propositions des candidats à la reprise, certaines étant survenues en dernière minute.
Sans parler du temps perdu durant le feuilleton chinois HNA… Nous nous sommes attachés prioritairement à faire réduire le nombre global de licenciements, en pressant aussi les décideurs - en vain, malheureusement - d’inclure dans le périmètre de cession nos collègues des filiales à l’étranger ». On connaît désormais leur sort...
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"La page est définitivement tournée pour la plupart d’entre nous"
Pour limiter la casse au maximum, « nous avons mis l’accent sur le volontariat - dont la RH (ressources humaines, ndlr), prétextant un manque de temps ne voulait pas entendre parler - et étudié les diverses passerelles possibles visant à conserver un maximum de postes de travail.
Nous avons dû aussi faire intervenir l'Inspection du Travail et l'administrateur judiciaire, devant le peu d’empressement du repreneur à fournir les dossiers des personnels licenciés, indispensables au calcul des soldes de tout compte.
La nouvelle équipe aux commandes a carrément fait l’impasse sur cette période transitoire qui suit logiquement toute cession d’entreprise assortie d’un plan social.
Nous nous sommes aussi longuement préoccupés des cotisations sociales AGIRC et ARRCO, occultées pour l’année 2015 sur les relevés de carrière. J’en oublie certainement.
Sept années se sont écoulées depuis ces événements, la page est définitivement tournée pour la plupart d’entre nous », ajoute Michèle Przybysz.
Pour elle, comme pour l'une de ses collègues IRP, toutes deux élues au suivi du plan social, la période de mise en place du plan en question a été « le volet le moins sombre de la liquidation, car nous débouchions la plupart du temps sur du positif. Les salariés ont témoigné beaucoup de motivation et déployé une grande énergie.
L’accompagnement s’effectuait via un cabinet spécialisé très compétent et de plus, nous disposions de fonds conséquents, alloués par le repreneur, pour faciliter la reconversion des salariés licenciés. Le tout sous la houlette de la mandataire judiciaire, de l'Inspection du Travail, de la DIRECCTE et de Pôle Emploi.
Pendant ces deux ans, nous avons communiqué et gardé un contact permanent avec l’ensemble des protagonistes. Ce fut à la fois intense et gratifiant », se remémore-t-elle.
Pour rappel, en 2015, le repreneur s'était engagé à garder 429 CDI. Le plan de sauvegarde de l'emploi a porté sur 78 postes. Les 650 salariés des filiales de FRAM à l'étranger (Espagne, Grèce, Sénégal, Maroc et Tunisie) ne faisaient pas partie de l'offre de reprise. En 2022, le Groupe Fram emploie environ 225 CDI.
Nous avons dû aussi faire intervenir l'Inspection du Travail et l'administrateur judiciaire, devant le peu d’empressement du repreneur à fournir les dossiers des personnels licenciés, indispensables au calcul des soldes de tout compte.
La nouvelle équipe aux commandes a carrément fait l’impasse sur cette période transitoire qui suit logiquement toute cession d’entreprise assortie d’un plan social.
Nous nous sommes aussi longuement préoccupés des cotisations sociales AGIRC et ARRCO, occultées pour l’année 2015 sur les relevés de carrière. J’en oublie certainement.
Sept années se sont écoulées depuis ces événements, la page est définitivement tournée pour la plupart d’entre nous », ajoute Michèle Przybysz.
Pour elle, comme pour l'une de ses collègues IRP, toutes deux élues au suivi du plan social, la période de mise en place du plan en question a été « le volet le moins sombre de la liquidation, car nous débouchions la plupart du temps sur du positif. Les salariés ont témoigné beaucoup de motivation et déployé une grande énergie.
L’accompagnement s’effectuait via un cabinet spécialisé très compétent et de plus, nous disposions de fonds conséquents, alloués par le repreneur, pour faciliter la reconversion des salariés licenciés. Le tout sous la houlette de la mandataire judiciaire, de l'Inspection du Travail, de la DIRECCTE et de Pôle Emploi.
Pendant ces deux ans, nous avons communiqué et gardé un contact permanent avec l’ensemble des protagonistes. Ce fut à la fois intense et gratifiant », se remémore-t-elle.
Pour rappel, en 2015, le repreneur s'était engagé à garder 429 CDI. Le plan de sauvegarde de l'emploi a porté sur 78 postes. Les 650 salariés des filiales de FRAM à l'étranger (Espagne, Grèce, Sénégal, Maroc et Tunisie) ne faisaient pas partie de l'offre de reprise. En 2022, le Groupe Fram emploie environ 225 CDI.
Retraites complémentaires : "le sentiment d’avoir subi un préjudice évident est fort"
En parallèle de son rôle d'IRP, Michèle Przybysz a mené jusqu'à récemment un autre combat : faire valoir ses droits à la retraite complémentaire, prévue pour les cadres du Groupe.
Comme elle, une dizaine d’anciens salariés licenciés dans le cadre du PSE qui a suivi la cession, cadres et employés, ont engagé des actions.
« Dès la cession de Fram actée, nous avons plusieurs fois interpellé administrateur et mandataire judiciaires à ce sujet. En vain.
Nous avons alors successivement écrit au juge commissaire, puis au Président du Tribunal de Commerce de Toulouse, puis à la Ministre de la Justice en personne, lesquels nous ont tous trois royalement ignorés. Pas l’ombre d’une réponse.
Seul le procureur de la République a répondu à notre requête, nous conseillant de nous tourner vers un avocat. Dont acte, explique Michèle Przybysz.
Au final, nous avons perdu notre procès, en première instance et en appel. Nous en restons là, nous n’irons pas plus loin. Seul regret : n’avoir pas songé à délocaliser d’emblée notre affaire, loin de Toulouse... »
« A ma connaissance, et à ce jour, il n’y a pas eu de décision favorable aux anciens salariés. Certains défendaient la reconnaissance d’une créance salariale de nature superprivilégiée, d’autres revendiquaient une créance de dommages et intérêts, de nature chirographaire », ajoute Michel Cabrol, l'ancien directeur financier de Fram.
Malgré un dossier extrêmement complet, le Tribunal de Commerce de Toulouse ne s'est pas prononcé en faveur de ces ex-salariés.
D'autres, qui sont restés en poste quelques mois après la reprise par LBO France, ont pu en revanche en bénéficier. « Loin de moi l’idée de « jalouser » ou de considérer mes collègues repris, comme des privilégiés !, poursuit Michel Cabrol.
A ma connaissance d’ailleurs, cet accord collectif aurait été dénoncé en février 2017. Par contre, le sentiment d’avoir subi un préjudice évident est fort, puisqu’il y avait sur ce contrat, un fonds collectif abondé pour plus d'un million d’euros à l’ouverture de la procédure, et que ce dernier a été intégralement transféré au repreneur, avec pour conséquence la non-protection des droits à la retraite supplémentaire des salariés licenciés dans le cadre du PSE (Plan de sauvegarde de l'emploi, ndlr).
Ces salariés souvent « seniors », ont subi la double peine puisqu’ils se sont retrouvés éloignés du marché du travail en raison de leur manque d’attractivité ».
LIRE AUSSI : 625 000 euros... Chapeau les retraites chez Fram !
Comme elle, une dizaine d’anciens salariés licenciés dans le cadre du PSE qui a suivi la cession, cadres et employés, ont engagé des actions.
« Dès la cession de Fram actée, nous avons plusieurs fois interpellé administrateur et mandataire judiciaires à ce sujet. En vain.
Nous avons alors successivement écrit au juge commissaire, puis au Président du Tribunal de Commerce de Toulouse, puis à la Ministre de la Justice en personne, lesquels nous ont tous trois royalement ignorés. Pas l’ombre d’une réponse.
Seul le procureur de la République a répondu à notre requête, nous conseillant de nous tourner vers un avocat. Dont acte, explique Michèle Przybysz.
Au final, nous avons perdu notre procès, en première instance et en appel. Nous en restons là, nous n’irons pas plus loin. Seul regret : n’avoir pas songé à délocaliser d’emblée notre affaire, loin de Toulouse... »
« A ma connaissance, et à ce jour, il n’y a pas eu de décision favorable aux anciens salariés. Certains défendaient la reconnaissance d’une créance salariale de nature superprivilégiée, d’autres revendiquaient une créance de dommages et intérêts, de nature chirographaire », ajoute Michel Cabrol, l'ancien directeur financier de Fram.
Malgré un dossier extrêmement complet, le Tribunal de Commerce de Toulouse ne s'est pas prononcé en faveur de ces ex-salariés.
D'autres, qui sont restés en poste quelques mois après la reprise par LBO France, ont pu en revanche en bénéficier. « Loin de moi l’idée de « jalouser » ou de considérer mes collègues repris, comme des privilégiés !, poursuit Michel Cabrol.
A ma connaissance d’ailleurs, cet accord collectif aurait été dénoncé en février 2017. Par contre, le sentiment d’avoir subi un préjudice évident est fort, puisqu’il y avait sur ce contrat, un fonds collectif abondé pour plus d'un million d’euros à l’ouverture de la procédure, et que ce dernier a été intégralement transféré au repreneur, avec pour conséquence la non-protection des droits à la retraite supplémentaire des salariés licenciés dans le cadre du PSE (Plan de sauvegarde de l'emploi, ndlr).
Ces salariés souvent « seniors », ont subi la double peine puisqu’ils se sont retrouvés éloignés du marché du travail en raison de leur manque d’attractivité ».
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"Les sommes ont été versées aux salariés admissibles dans la limite des fonds disponibles"
Sur ces contrats de retraite supplémentaire, existants préalablement à la reprise, « les sommes ont été versées aux salariés admissibles dans la limite des fonds disponibles, indique Alain de Mendonça, président du Groupe Karavel-Promovacances et de Voyages FRAM. A titre d information, le solde de Voyages Fram transmis au « Nouveau Fram » était récemment de 15 000 euros.
En aucun cas, le « nouveau Fram » ne peut payer ces retraites supplémentaires au-delà des montants transmis car « le nouveau Fram » représente une entité juridique nouvelle qui ne fait que gérer les soldes du système de régime supplémentaire de « l'ancien Fram », nous explique-t-il.
Certains anciens cadres n'ont pas forcément compris cette articulation juridique. On attend avec impatience l'issue de toutes éventuelles procédures judiciaires afin d''enlever toutes les doutes sur ce sujet ».
Entre 15 000 euros et un million - exactement 1,055 million d'euros selon la compagnie d'assurance Swisslife qui gérait ce fonds collectif - la question qui se pose est : mais où est passé l'argent ?
Car selon nos informations, les deux retraités de Fram qui ont pu bénéficier de ce fonds ont touché au global 382 000€. Où sont donc passés les 673 000€ restants ?
« Il est tout à fait normal que le personnel proche de la retraite repris par le nouveau Fram ait pu bénéficier de ce dispositif mis en place par l’ancien Fram. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est la rapide résiliation du contrat par le repreneur, qui en a récupéré les fonds. Au profit de qui ? En tout cas, pas à celui des salariés restants…, s'étonne Michèle Przybysz.
Il nous paraît évident que ce contrat, dont le fruit de l’abondement était destiné aux seuls salariés de Fram, n’avait pas vocation à se retrouver dans les négociations de cession de l’entreprise. Ou alors sous conditions précises, dans l’intérêt exclusif des personnels licenciés et conservés ».
Aujourd’hui, déboutés en justice, les ex-salariés de Fram sont tout de même inscrits au tableau des créances chirographaires (donc non prioritaires), à hauteur de 1 ou 2 euros chacun.
En aucun cas, le « nouveau Fram » ne peut payer ces retraites supplémentaires au-delà des montants transmis car « le nouveau Fram » représente une entité juridique nouvelle qui ne fait que gérer les soldes du système de régime supplémentaire de « l'ancien Fram », nous explique-t-il.
Certains anciens cadres n'ont pas forcément compris cette articulation juridique. On attend avec impatience l'issue de toutes éventuelles procédures judiciaires afin d''enlever toutes les doutes sur ce sujet ».
Entre 15 000 euros et un million - exactement 1,055 million d'euros selon la compagnie d'assurance Swisslife qui gérait ce fonds collectif - la question qui se pose est : mais où est passé l'argent ?
Car selon nos informations, les deux retraités de Fram qui ont pu bénéficier de ce fonds ont touché au global 382 000€. Où sont donc passés les 673 000€ restants ?
« Il est tout à fait normal que le personnel proche de la retraite repris par le nouveau Fram ait pu bénéficier de ce dispositif mis en place par l’ancien Fram. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est la rapide résiliation du contrat par le repreneur, qui en a récupéré les fonds. Au profit de qui ? En tout cas, pas à celui des salariés restants…, s'étonne Michèle Przybysz.
Il nous paraît évident que ce contrat, dont le fruit de l’abondement était destiné aux seuls salariés de Fram, n’avait pas vocation à se retrouver dans les négociations de cession de l’entreprise. Ou alors sous conditions précises, dans l’intérêt exclusif des personnels licenciés et conservés ».
Aujourd’hui, déboutés en justice, les ex-salariés de Fram sont tout de même inscrits au tableau des créances chirographaires (donc non prioritaires), à hauteur de 1 ou 2 euros chacun.
"Le paiement partiel des créanciers chirographaires est réalisable"
Sur les centaines de créanciers de Fram, peu ont pu pour l'heure être remboursés. Il faut dire que le montant total des créances avoisine les 90 M€ d'euros.
Néanmoins, contrairement à des faillites comme celle de Thomas Cook France, où les caisses de la procédure sont vides, du côté de Toulouse, il reste des fonds.
« Il ressort des documents établis par le Cabinet d’expertise-comptable FIDSUDCDBA, mandaté à l’ouverture de la procédure, que la trésorerie positive ressort à 25 M€ pour l’ensemble du périmètre de la liquidation judiciaire, analyse Michel Cabrol.
Et l'ancien directeur financier de décortiquer l'état des créances : « Il ressort de l’établissement de la liste des créanciers établie par le Tribunal que, sur les 90 M€ de créances, seulement 3 M€ sont superprivilégiées et 8 M€ sont privilégiées.
Par ailleurs, un programme de cessions d’actifs a eu lieu (Sénégal, Espagne, siège social, etc.), venant ainsi renforcer la trésorerie de la procédure. Objectivement, il apparaît que le paiement partiel des créanciers chirographaires est réalisable », analyse-t-il.
Mais alors pourquoi un délai si long ? Le sort des filiales marocaines, toujours en suspens, pourrait-il empêcher la clôture de la liquidation et le démarrage des remboursements ?
LIRE AUSSI : EXCLUSIF - Fram : les filiales marocaines bientôt liquidées ? 🔑
« Je dirais que la situation marocaine ne bloque pas la procédure, mais peut-être la retarde significativement, poursuit Michel Cabrol. Car aux termes du jugement du Tribunal de Commerce de Toulouse du 30 juin 2020, les fonds résiduels sur les déposits - liés aux cessions d'hôtels - bloqués s’élevaient encore à 45 millions de dirhams, soit 4,5 M€.
Par ailleurs, alors que le « dispositif Filiales Marocaines » devait être maintenu « in bonis », la filiale Fram Orange Tours est sous administration judiciaire marocaine alors qu’elle contrôle majoritairement en capital, les deux autres filiales Framotel & ITC, porteuses des déposits ».
Néanmoins, contrairement à des faillites comme celle de Thomas Cook France, où les caisses de la procédure sont vides, du côté de Toulouse, il reste des fonds.
« Il ressort des documents établis par le Cabinet d’expertise-comptable FIDSUDCDBA, mandaté à l’ouverture de la procédure, que la trésorerie positive ressort à 25 M€ pour l’ensemble du périmètre de la liquidation judiciaire, analyse Michel Cabrol.
Et l'ancien directeur financier de décortiquer l'état des créances : « Il ressort de l’établissement de la liste des créanciers établie par le Tribunal que, sur les 90 M€ de créances, seulement 3 M€ sont superprivilégiées et 8 M€ sont privilégiées.
Par ailleurs, un programme de cessions d’actifs a eu lieu (Sénégal, Espagne, siège social, etc.), venant ainsi renforcer la trésorerie de la procédure. Objectivement, il apparaît que le paiement partiel des créanciers chirographaires est réalisable », analyse-t-il.
Mais alors pourquoi un délai si long ? Le sort des filiales marocaines, toujours en suspens, pourrait-il empêcher la clôture de la liquidation et le démarrage des remboursements ?
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« Je dirais que la situation marocaine ne bloque pas la procédure, mais peut-être la retarde significativement, poursuit Michel Cabrol. Car aux termes du jugement du Tribunal de Commerce de Toulouse du 30 juin 2020, les fonds résiduels sur les déposits - liés aux cessions d'hôtels - bloqués s’élevaient encore à 45 millions de dirhams, soit 4,5 M€.
Par ailleurs, alors que le « dispositif Filiales Marocaines » devait être maintenu « in bonis », la filiale Fram Orange Tours est sous administration judiciaire marocaine alors qu’elle contrôle majoritairement en capital, les deux autres filiales Framotel & ITC, porteuses des déposits ».
Quand les anciens dirigeants de Fram parviennent à se faire rembourser...
Le blocage marocain n'a tout de même pas empêché une partie des créanciers de récupérer de l'argent sur la procédure, comme nous l'évoquions déjà en juin dernier, notamment les anciens dirigeants de Fram : Georges Colson, Marie-Christine Chaubet, Marie-Laurence Vieuille-Feral.
Ces derniers « avaient apporté, dans le cadre d’une conciliation en janvier 2013, 3 M€ en comptes courants, resitue Michel Cabrol, qui était également signataire de ce protocole d’accord de conciliation.
Le jugement d’homologation du Tribunal de Commerce de Toulouse du 28 janvier 2013 a statué que seuls les nouveaux apports des banques bénéficiaient du « privilège de new money ». En tant que créancier de la procédure, je m’interroge légitimement, et vous en conviendrez, sur les remboursements obtenus par les anciens actionnaires au titre du « privilège de new money »....
Plus globalement, comment expliquer que les créanciers, en dehors de l’accord de conciliation, étaient mieux protégés au moment de la conciliation, en raison d’un « privilège de new money restrictif » - les apports des banques - que les créanciers d’aujourd’hui en situation beaucoup plus précaire face à une liquidation judiciaire, et « un privilège de new money étendu » aux apports des actionnaires ? », s'interroge-t-il.
Contactée, Marie-Christine Chaubet, qui a pourtant pu récupérer 870 000€, nous indique avoir été « mise totalement à l’écart de la procédure dès le début » et n'être « pas à même d’apporter un jugement impartial ». Cherchez l'erreur !
Ces derniers « avaient apporté, dans le cadre d’une conciliation en janvier 2013, 3 M€ en comptes courants, resitue Michel Cabrol, qui était également signataire de ce protocole d’accord de conciliation.
Le jugement d’homologation du Tribunal de Commerce de Toulouse du 28 janvier 2013 a statué que seuls les nouveaux apports des banques bénéficiaient du « privilège de new money ». En tant que créancier de la procédure, je m’interroge légitimement, et vous en conviendrez, sur les remboursements obtenus par les anciens actionnaires au titre du « privilège de new money »....
Plus globalement, comment expliquer que les créanciers, en dehors de l’accord de conciliation, étaient mieux protégés au moment de la conciliation, en raison d’un « privilège de new money restrictif » - les apports des banques - que les créanciers d’aujourd’hui en situation beaucoup plus précaire face à une liquidation judiciaire, et « un privilège de new money étendu » aux apports des actionnaires ? », s'interroge-t-il.
Contactée, Marie-Christine Chaubet, qui a pourtant pu récupérer 870 000€, nous indique avoir été « mise totalement à l’écart de la procédure dès le début » et n'être « pas à même d’apporter un jugement impartial ». Cherchez l'erreur !
4 M€ accordés à LBO France sur la procédure
Les actionnaires ne sont pas les seuls à avoir bénéficié d'une partie des fonds de la procédure.
En effet, le repreneur, à savoir LBO France, a pu conserver, par jugement du Tribunal de Commerce de Toulouse du 4 avril 2018, un acompte de 4 M€ accordé en novembre 2016.
Il s'agissait au départ d'une avance faite pour permettre au repreneur de bénéficier de cash « pour faire face aux échéances à court terme (comme par exemple, le paiement fournisseurs) afin d’éviter un arrêt de l’activité, explique Alain de Mendonça.
Une fois la situation d'urgence gérée, l'administrateur judiciaire et le repreneur font les comptes précis des charges financières dues par l’administrateur (car propre à du passif antérieur à la date de reprise) de celles qui sont à la charge du repreneur (propre à l'activité post reprise) : on appelle cela les comptes « pro rata » ».
Or dans le cas de Fram, administrateurs et repreneur n'étaient pas d'accord sur le montant de ces comptes. Alors que les organes de la procédure, s'appuyant sur un rapport du cabinet Eight Advisory, réclamaient au repreneur 206 000€, ce dernier demandait le remboursement de 11,9M€.
Pourquoi un tel écart ? Les deux parties étaient en désaccord sur la notion de « fait générateur », c'est-à-dire à partir de quel moment le repreneur doit-il prendre en charge les dossiers réalisés avant la reprise ?
Pour LBO France, la notion d'engagement correspondait à la date de la réservation, tandis que pour les organes de la procédure - et conformément au jugement de reprise de Fram de novembre 2015 - elle correspondait à la réalisation de la prestation.
Finalement, les deux parties ont pu éviter le procès grâce à un accord transactionnel. « Toute cette opération a été analysée et validée de façon minutieuse par tous les organes compétents du Tribunal de Commerce », commente Alain de Mendonça.
« Il me semble que dans le jugement de cession du 25 Novembre 2015, les règles étaient bien établies, et il y avait une acceptation réciproque de ces règles par les parties - engagements et contrats clients -, nuance Michel Cabrol. La solution retenue dans l’accord transactionnel conduit, de mon point de vue, à un compromis « asymétrique ».
Le repreneur encaisse tout le chiffre d’affaires sur ces départs, les cédants et donc la procédure, accepte de prendre en charge 4 M€ au titre des charges sur ces mêmes départs. A ce stade, je ne peux que présupposer que la préservation de l’intérêt collectif des créanciers a été prise en compte, avant ces deux décisions prises par le Tribunal de Commerce de Toulouse ».
En effet, le repreneur, à savoir LBO France, a pu conserver, par jugement du Tribunal de Commerce de Toulouse du 4 avril 2018, un acompte de 4 M€ accordé en novembre 2016.
Il s'agissait au départ d'une avance faite pour permettre au repreneur de bénéficier de cash « pour faire face aux échéances à court terme (comme par exemple, le paiement fournisseurs) afin d’éviter un arrêt de l’activité, explique Alain de Mendonça.
Une fois la situation d'urgence gérée, l'administrateur judiciaire et le repreneur font les comptes précis des charges financières dues par l’administrateur (car propre à du passif antérieur à la date de reprise) de celles qui sont à la charge du repreneur (propre à l'activité post reprise) : on appelle cela les comptes « pro rata » ».
Or dans le cas de Fram, administrateurs et repreneur n'étaient pas d'accord sur le montant de ces comptes. Alors que les organes de la procédure, s'appuyant sur un rapport du cabinet Eight Advisory, réclamaient au repreneur 206 000€, ce dernier demandait le remboursement de 11,9M€.
Pourquoi un tel écart ? Les deux parties étaient en désaccord sur la notion de « fait générateur », c'est-à-dire à partir de quel moment le repreneur doit-il prendre en charge les dossiers réalisés avant la reprise ?
Pour LBO France, la notion d'engagement correspondait à la date de la réservation, tandis que pour les organes de la procédure - et conformément au jugement de reprise de Fram de novembre 2015 - elle correspondait à la réalisation de la prestation.
Finalement, les deux parties ont pu éviter le procès grâce à un accord transactionnel. « Toute cette opération a été analysée et validée de façon minutieuse par tous les organes compétents du Tribunal de Commerce », commente Alain de Mendonça.
« Il me semble que dans le jugement de cession du 25 Novembre 2015, les règles étaient bien établies, et il y avait une acceptation réciproque de ces règles par les parties - engagements et contrats clients -, nuance Michel Cabrol. La solution retenue dans l’accord transactionnel conduit, de mon point de vue, à un compromis « asymétrique ».
Le repreneur encaisse tout le chiffre d’affaires sur ces départs, les cédants et donc la procédure, accepte de prendre en charge 4 M€ au titre des charges sur ces mêmes départs. A ce stade, je ne peux que présupposer que la préservation de l’intérêt collectif des créanciers a été prise en compte, avant ces deux décisions prises par le Tribunal de Commerce de Toulouse ».
LBO France a-t-il récupéré sa mise de départ ?
L'ex-directeur financier de Fram ne manque pas, au passage, de souligner comment, selon lui, le repreneur a su en seulement deux ans, récupérer sa mise de départ - soit 10M€ - pour le rachat de Fram/Plein Vent.
Il le justifie par les 4 M€ du protocole transactionnel, la reprise des 3,6 M€ des comptes Swisslife et Winterthur (dédiés aux retraites complémentaires et indemnités de fin de carrière), mais aussi la vente de Fram Nature et son site de Soustons à Sandaya début 2017 pour 6 M€.
Pourtant, dans son offre de reprise améliorée, Voyages Invest s’était engagé à ne pas vendre le site dans les deux ans suivant la cession.
« Lors de la reprise de Fram, notre plan initial était de garder le camping de Soustons. Hors quelques mois après la reprise de Fram, la compagnie aérienne Air Méditerranée a fait faillite de façon retentissante compliquant la tâche du sauvetage de Fram car « Air Med » était la compagnie historique du groupe, relate Alain de Mendonça.
Ce dépôt de bilan brutal a impacté notre business plan de reprise en 2016 et nous nous sommes donc résolus à vendre le camping de Soustons qui ne correspondait pas au savoir-faire historique de Fram.
Bien entendu, nous avons sollicité et obtenu l'accord du Tribunal de Commerce de Toulouse afin de leur expliquer les raisons de ce changement. Ils ont donné leur plein accord pour la réalisation de cette opération, se défend-il.
L'argent de la cession a permis de financer de nombreux projets afin de poursuivre le redressement et la modernisation de l'entreprise Fram qui est redevenu en 2022 un des premiers tour-opérateurs nationaux avec une grande solidité financière et le support du fonds d'investissement Equistone ».
Pour rappel, Air Méditerranée a été placée en redressement judiciaire en janvier 2015, soit dix mois avant la liquidation de Fram, on peut donc supposer que la problématique « Air Med » était posée au moment de la reprise de Fram.
Il le justifie par les 4 M€ du protocole transactionnel, la reprise des 3,6 M€ des comptes Swisslife et Winterthur (dédiés aux retraites complémentaires et indemnités de fin de carrière), mais aussi la vente de Fram Nature et son site de Soustons à Sandaya début 2017 pour 6 M€.
Pourtant, dans son offre de reprise améliorée, Voyages Invest s’était engagé à ne pas vendre le site dans les deux ans suivant la cession.
« Lors de la reprise de Fram, notre plan initial était de garder le camping de Soustons. Hors quelques mois après la reprise de Fram, la compagnie aérienne Air Méditerranée a fait faillite de façon retentissante compliquant la tâche du sauvetage de Fram car « Air Med » était la compagnie historique du groupe, relate Alain de Mendonça.
Ce dépôt de bilan brutal a impacté notre business plan de reprise en 2016 et nous nous sommes donc résolus à vendre le camping de Soustons qui ne correspondait pas au savoir-faire historique de Fram.
Bien entendu, nous avons sollicité et obtenu l'accord du Tribunal de Commerce de Toulouse afin de leur expliquer les raisons de ce changement. Ils ont donné leur plein accord pour la réalisation de cette opération, se défend-il.
L'argent de la cession a permis de financer de nombreux projets afin de poursuivre le redressement et la modernisation de l'entreprise Fram qui est redevenu en 2022 un des premiers tour-opérateurs nationaux avec une grande solidité financière et le support du fonds d'investissement Equistone ».
Pour rappel, Air Méditerranée a été placée en redressement judiciaire en janvier 2015, soit dix mois avant la liquidation de Fram, on peut donc supposer que la problématique « Air Med » était posée au moment de la reprise de Fram.
Fram, toujours là sept ans (et une pandémie) plus tard
Aujourd’hui, il subsiste une question : si des actionnaires et le repreneur ont pu récupérer de l'argent sur la procédure, pourquoi les créanciers ne pourraient-ils pas bénéficier - même partiellement - de cette même opportunité ?
Contacté à plusieurs reprises, le cabinet Benoit et Associés, en charge de la liquidation, n'a jamais répondu à nos demandes d'interview.
Quant aux ex-salariés, Michèle Przybysz ne s'attend plus à récupérer la somme qui lui était due. Si les fonds sont un jour débloqués, « il est à espérer qu’ils serviront en tout premier lieu à indemniser les nombreux prestataires que la liquidation de Fram a laissés sur le carreau », commente-t-elle.
Quant à Michel Cabrol, il réfléchit à la suite. « Toutes les voies de recours à date ne sont pas épuisées, et je me réserve le droit d’en utiliser certaines. Avec un statut de créancier, j’ai découvert que le droit au contrôle de sa propre procédure, qui est parfois méconnu, peut être très utile pour la défense de ses intérêts ».
Malgré les rancœurs, les intérêts divergents, les privilèges discutables et les espoirs déchus de cette liquidation qui n'en finit plus, une seule chose est certaine : Fram est toujours là, sept ans (et une pandémie) plus tard !
LA SUITE A VENIR : Alain de Mendonça (Fram/Karavel) : "Notre entreprise va dégager à nouveau des bénéfices opérationnels en 2022"
Pour aller plus loin, retrouvez notre saga dédiée à Fram.
Contacté à plusieurs reprises, le cabinet Benoit et Associés, en charge de la liquidation, n'a jamais répondu à nos demandes d'interview.
Quant aux ex-salariés, Michèle Przybysz ne s'attend plus à récupérer la somme qui lui était due. Si les fonds sont un jour débloqués, « il est à espérer qu’ils serviront en tout premier lieu à indemniser les nombreux prestataires que la liquidation de Fram a laissés sur le carreau », commente-t-elle.
Quant à Michel Cabrol, il réfléchit à la suite. « Toutes les voies de recours à date ne sont pas épuisées, et je me réserve le droit d’en utiliser certaines. Avec un statut de créancier, j’ai découvert que le droit au contrôle de sa propre procédure, qui est parfois méconnu, peut être très utile pour la défense de ses intérêts ».
Malgré les rancœurs, les intérêts divergents, les privilèges discutables et les espoirs déchus de cette liquidation qui n'en finit plus, une seule chose est certaine : Fram est toujours là, sept ans (et une pandémie) plus tard !
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Pour aller plus loin, retrouvez notre saga dédiée à Fram.