A quoi ressembleront les campings, sans tentes ni emplacements ? DR : Olivier Lemercier, gérant du camping de l’Iscle de Prelles
Ah, Léo Lagrange, le tout premier ministre du tourisme. Ce qu’il disait en 1934 fait singulièrement écho, près d’un siècle plus tard : « le loisir devient presque plus important que le travail (...) [Il] deviendra la part la plus importante de la vie ».
Fort de ce constat, il estimait que le tourisme populaire était une des meilleures manières de favoriser la mixité sociale et d’aider au bien-être de tout un chacun.
Et pour développer le tourisme populaire, il s’appuie sur les campings, les réseaux d’auberges de jeunesse et les colonies de vacances.
Lire aussi : Homo touristicus : "On déteste cet être qui voyage sans raison évidente..."
Les temps changent et avec eux, le tourisme.
Bien qu’elles reçoivent de moins en moins de monde, ces dernières gardent encore un caractère démocratique grâce notamment aux associations d’éducation populaire.
Quant aux campings et aux auberges de jeunesse, le constat des clients est de plus en plus amer. Les aficionados de l’auberge de jeunesse et du camping ont de plus en plus de mal à trouver un emplacement nu ou un lit en dortoir.
En matière de développement durable, l’écologique ne suffit pas, le social est aussi un critère d’importance.
Alors que l’inflation pèse et que l’écart entre les plus riches et les plus pauvres augmente, les vacances des plus précaires se compliquent.
Fort de ce constat, il estimait que le tourisme populaire était une des meilleures manières de favoriser la mixité sociale et d’aider au bien-être de tout un chacun.
Et pour développer le tourisme populaire, il s’appuie sur les campings, les réseaux d’auberges de jeunesse et les colonies de vacances.
Lire aussi : Homo touristicus : "On déteste cet être qui voyage sans raison évidente..."
Les temps changent et avec eux, le tourisme.
Bien qu’elles reçoivent de moins en moins de monde, ces dernières gardent encore un caractère démocratique grâce notamment aux associations d’éducation populaire.
Quant aux campings et aux auberges de jeunesse, le constat des clients est de plus en plus amer. Les aficionados de l’auberge de jeunesse et du camping ont de plus en plus de mal à trouver un emplacement nu ou un lit en dortoir.
En matière de développement durable, l’écologique ne suffit pas, le social est aussi un critère d’importance.
Alors que l’inflation pèse et que l’écart entre les plus riches et les plus pauvres augmente, les vacances des plus précaires se compliquent.
Des campings sans campeur
« 80 % de la population française a une bonne image du camping. Mais le regard des campeurs habitués, lui, se dégrade » observe Olivier Lemercier, gérant du camping de l’Iscle de Prelles dans les Hautes-Alpes.
En cause : la diminution du nombre d’emplacements nus au profit des bungalows. Et c’est vrai que pour les habitués, qui viennent en camping pour se détendre en pleine nature, planter sa tente entre un bungalow en dur et un mobil-home, c’est un peu décevant.
Au-delà du plaisir de camper, cette tendance réduit à peau de chagrin les possibilités de vacances peu coûteuses.
Olivier Lemercier est l’un des fondateurs de l’association Sauvons le vrai camping qui veut préserver les emplacements nus dans les campings pour les différencier des établissements qui se transforment en « villages plein air ».
En cause selon lui : la financiarisation du secteur, avec l’arrivée de fonds de pension dans le capital de certains établissements et la concentration autour de grands groupes. Une course à la rentabilité qui détériore l’expérience des campeurs « canal historique », ironiquement chassés des campings par le manque d'emplacements nus.
Mais l’association ne veut pas définanciariser ni déconcentrer. La seule chose qu’elle demande : sauvegarder les emplacements nus alors que leur nombre baisse d’environ 3 % par an.
Lire aussi : Nicolas Dayot : "Il faut stopper la disparition des campings français"
« On doit forcer les gérants à accepter les campeurs. Soit par la loi, soit par le classement Atout France. Aujourd’hui, il se fait sur la base de 195 critères.
Pour avoir ses étoiles, on nous oblige à avoir le Wi-Fi, des aires de jeux… Mais pas une seule mention des campeurs ! On ne doit pas nécessairement avoir des sanitaires collectifs, des douches ou une laverie…
Nous demandons un 196ème critère : pour être classé, le camping doit préserver entre 25 et 30 % d’emplacements nus ».
Une montée en gamme qui n’est pas contestée par l’association, mais qui éloigne du camping ses premiers bénéficiaires : les classes sociales populaires, les classes moyennes inférieures et les étudiants.
En cause : la diminution du nombre d’emplacements nus au profit des bungalows. Et c’est vrai que pour les habitués, qui viennent en camping pour se détendre en pleine nature, planter sa tente entre un bungalow en dur et un mobil-home, c’est un peu décevant.
Au-delà du plaisir de camper, cette tendance réduit à peau de chagrin les possibilités de vacances peu coûteuses.
Olivier Lemercier est l’un des fondateurs de l’association Sauvons le vrai camping qui veut préserver les emplacements nus dans les campings pour les différencier des établissements qui se transforment en « villages plein air ».
En cause selon lui : la financiarisation du secteur, avec l’arrivée de fonds de pension dans le capital de certains établissements et la concentration autour de grands groupes. Une course à la rentabilité qui détériore l’expérience des campeurs « canal historique », ironiquement chassés des campings par le manque d'emplacements nus.
Mais l’association ne veut pas définanciariser ni déconcentrer. La seule chose qu’elle demande : sauvegarder les emplacements nus alors que leur nombre baisse d’environ 3 % par an.
Lire aussi : Nicolas Dayot : "Il faut stopper la disparition des campings français"
« On doit forcer les gérants à accepter les campeurs. Soit par la loi, soit par le classement Atout France. Aujourd’hui, il se fait sur la base de 195 critères.
Pour avoir ses étoiles, on nous oblige à avoir le Wi-Fi, des aires de jeux… Mais pas une seule mention des campeurs ! On ne doit pas nécessairement avoir des sanitaires collectifs, des douches ou une laverie…
Nous demandons un 196ème critère : pour être classé, le camping doit préserver entre 25 et 30 % d’emplacements nus ».
Une montée en gamme qui n’est pas contestée par l’association, mais qui éloigne du camping ses premiers bénéficiaires : les classes sociales populaires, les classes moyennes inférieures et les étudiants.
Des auberges sans jeunesse
Ce qui est vrai pour les campings l’est aussi pour les auberges de jeunesse : de plus en plus, la clientèle classique est remplacée par un public plus aisé, qui aime la simplicité qu’offre ce type d’hébergement, mais ne veut pas renoncer aux avantages d’une hôtellerie classique.
Les auberges de jeunesse se gentrifient ! Et pour contenter cette nouvelle clientèle, les dortoirs font place aux chambres, et les prix sont tirés vers le haut.
C’est ce que dénonce sur LinkedIn Alain Marty, spécialiste de l’hôtellerie et consultant en développement durable : « Quel est le tarif d'un lit en dortoir mixte (8 personnes) à Paris en 2023 ? Par exemple, au hasard, le "The Paris People Marais" en mai. Réponse : 96 € par nuit sur Booking.com. Nous parlons bien ici d'1 lit dans un dortoir. »
Ainsi, une étude mise à jour le 5 mai 2023 pour Hostel.com évalue « le prix d'une nuit dans un hostel ou auberge de jeunesse (dortoir ou chambre pour 2 adultes) en France en 2023 » à 100 € (avec un prix minimum de 85 € et maximum de 116 €).
Les auberges de jeunesse se gentrifient ! Et pour contenter cette nouvelle clientèle, les dortoirs font place aux chambres, et les prix sont tirés vers le haut.
C’est ce que dénonce sur LinkedIn Alain Marty, spécialiste de l’hôtellerie et consultant en développement durable : « Quel est le tarif d'un lit en dortoir mixte (8 personnes) à Paris en 2023 ? Par exemple, au hasard, le "The Paris People Marais" en mai. Réponse : 96 € par nuit sur Booking.com. Nous parlons bien ici d'1 lit dans un dortoir. »
Ainsi, une étude mise à jour le 5 mai 2023 pour Hostel.com évalue « le prix d'une nuit dans un hostel ou auberge de jeunesse (dortoir ou chambre pour 2 adultes) en France en 2023 » à 100 € (avec un prix minimum de 85 € et maximum de 116 €).
Je me suis alors tournée vers l’Union Étudiante, deuxième organisation étudiante de France, pour connaître son point de vue sur la question, et savoir si ces prix correspondaient à ceux que pourraient mettre un étudiant.
« Globalement, les prix sont exorbitants, me répond Emmy Marc, secrétaire fédérale de l’Union Étudiante. Les changements dans le tourisme rendent de moins en moins accessibles des lieux qui étaient faits pour les étudiants et les plus précaires. »
Des établissements qui, selon elle, « se romantisent, se boboïsent ». Et c’est vrai que de plus en plus, on valorise un côté start-up nation qui éloigne la clientèle plus classique.
En moyenne, si on en croit le Sénat, « les ressources mensuelles moyennes (et non médianes, ndlr) des étudiants s'établissent à 919 € » dont les 2/3 sont dévolus au logement.
Lire aussi : Le slow tourisme peut-il s'ancrer dans nos sociétés ?
Pour Emmy Marc, les étudiants, qui travaillent l’été, n’ont ni l’argent ni le temps de partir. Alors, que faire ? « On défend l’allocation d’autonomie et on souhaite préserver le service public du CROUS. Il proposait pourtant des partenariats à des prix abordables, avec l’UCPA par exemple, mais qui se raréfient »
Étudiants, précaires, classes populaires et moyennes basses ont de plus en plus de mal à profiter de leurs vacances. Certes, ils dépensent moins que d’autres.
Mais à l’heure de la sobriété, peut-être que le tourisme devrait revenir à ses fondamentaux : les loisirs populaires.
« Globalement, les prix sont exorbitants, me répond Emmy Marc, secrétaire fédérale de l’Union Étudiante. Les changements dans le tourisme rendent de moins en moins accessibles des lieux qui étaient faits pour les étudiants et les plus précaires. »
Des établissements qui, selon elle, « se romantisent, se boboïsent ». Et c’est vrai que de plus en plus, on valorise un côté start-up nation qui éloigne la clientèle plus classique.
En moyenne, si on en croit le Sénat, « les ressources mensuelles moyennes (et non médianes, ndlr) des étudiants s'établissent à 919 € » dont les 2/3 sont dévolus au logement.
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Pour Emmy Marc, les étudiants, qui travaillent l’été, n’ont ni l’argent ni le temps de partir. Alors, que faire ? « On défend l’allocation d’autonomie et on souhaite préserver le service public du CROUS. Il proposait pourtant des partenariats à des prix abordables, avec l’UCPA par exemple, mais qui se raréfient »
Étudiants, précaires, classes populaires et moyennes basses ont de plus en plus de mal à profiter de leurs vacances. Certes, ils dépensent moins que d’autres.
Mais à l’heure de la sobriété, peut-être que le tourisme devrait revenir à ses fondamentaux : les loisirs populaires.
Publié par Juliette Pic
Journaliste - rubrique Voyages Responsables - TourMaG.com
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