Tendances tourisme : c’est parce que rien ne change... que ça change tout ! [ABO]

Décembre c’est le mois choisi tous les ans par les spécialistes qui aiment communiquer sur les tendances du tourisme pour la nouvelle année qui pointe le bout de son année. En général ces tendances sociétales sont affinées au mois d’avril dès les vacances de Pâques terminées, par des tendances plus géographiques qui consistent à prédire les destinations qui seront les plus fréquentées l’été.

Ainsi donc chaque année il s’agit pour les cabinets spécialisés de se faire un peu de pub, et à ce petit jeu des prédictions, Mackinseypasgrandchose nous gratifie chaque année d’un « What is the future of travel ? » dans lequel on retrouve des acronymes de tendances très inspirés, qui ont succédé au « travel revenge » post covid.

En 2025, les experts se sont surpassés et nous proposent pèle mêle, des personas très typés tels que, les «Hurlkle Durkling » (les faignasses qui restent au lit toute la journée dont on se demande pourquoi ils partent loin de chez eux), ou plus poétique les, « Frolleagues » qui regroupent ceux qui partent entres amis-collègues ».

Autres catégories repérées qui devraient bouleverser l’économie touristique, les « MeMooners" ("voyageurs solo") à ne pas confondre avec "memooneuses", représentées par les femmes qui voyagent seules, mais dans des destinations et des hébergements « safe », un peu comme l’ont fait toutes les jeunes filles routardes depuis …30 ans !

Vous en voulez encore, allons-y !

En 2025, Les vacances seront JOMO, pour (Joy of missing out, « joie de rater quelque chose ») qu’il ne s’agit de ne pas confondre avec les vacances FOMO (Fear of missing out, peur de rater quelque chose). Il serait ainsi constaté que de plus en plus de vacanciers choisissent de s’éloigner du tumulte urbain et touristique pour retrouver un sentiment de « paix intérieure ». Amen !

Bon évidemment qu’il y a des tendances dans le tourisme, mais on devrait surtout parler de micros tendances tant les évolutions de la demande sont marginales.

Mais comment pourrait-il en être autrement dans la mesure où l’offre ne change pas vraiment ?

Le tourisme est une économie de service, et comme dans toute économie de service, c’est l’offre qui engendre la demande, donc difficile de faire émerger des vraies tendances de fond dans un contexte où l’offre reste la même, à l’exception des nouvelles destinations proposées par les voyagistes.

A cet effet il est très intéressant de constater que s’il y a une tendance lourde qui s’est vérifiée ces 10 dernières années, c’est le tourisme à vélo, mais parce que le développement de cette demande a été accompagnée par un travail de fond des pouvoirs publics sur l’offre d’itinéraires cyclables, et de citer pèle mêle la Via Rhôna, la vélodyséee, ou la Loire à vélo.

Dans un rapport très imagé d’un de ces producteurs de rapport de tendances, on n’hésite pas à écrire que l’année 2025 s’annonce comme une ère de transformation pour les voyages, en raison notamment de ce que l’IA apportera au voyageur dans sa quête d’expérience personnalisée.

Dans la foulée, 8 tendances lourdes sont présentées pour l’année 2025, et j’en ai retenue deux qui m’ont pour le moins intriguées.

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L’esprit Cow-Boy, qui fera voyager toutes celles et ceux qui aiment le Far West et la vie de ranch, et qui rechercheront des vacances rythmées par le son de la musique country. Pourquoi pas, mais plus loin, on tombe sur cette info assez surprenante, 42% des Français sont fans de l’esprit Cow-boy, et ce pourcentage atteint 50% chez les 25-34 ans. Incredible !

Autre tendance intrigante pour ne pas dire plus, « le Flower Power » qu’on pourrait aussi appeler le tourisme botanique dans un langage plus franchouillard et qui consiste à visiter des jardins pendant ses vacances, et autre donnée étonnante : pas moins de 77% des français interrogées par le voyagiste à l’origine de ce cahier de tendances 2025, annoncent avoir envie de visiter un jardin pendant ses vacances. Rien que ça !

Si vous connaissez des Esprit Cow-boy et des Flower Power, faites-moi signe, parce que perso même avec les copains de mes 4 enfants, jamais vu.

En vrai rien de nouveau sous le soleil, l’idée d’inventer des tendances pour faire parler de sa boite est un classique toujours bien en place dans le secteur du tourisme, et comme il s’agit de faire d’un épiphénomène, une tendance lourde, alors on grossi le trait, et on finit par des affirmations qui prêtent franchement à sourire.

Faire des tendances touristiques, des modèles prédictifs est un pari hasardeux que bien évidemment personne ne se risquera de contester ni même d’évaluer une fois l’année 2025 passée. On prédit beaucoup mais on évalue peu et c’est dommage, car cela vaudrait le coup de demander, d’un côté aux Agences de voyages de dresser le bilan, par destination et thématiques des voyages des Français, et de l’autre, demander aux OGD, de faire le même bilan et de comparer ce bilan à la moyenne de ces 10 dernières années.

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Ainsi, plutôt de nous dire chaque année que le tourisme durable a le vent en poupe, et que de plus en plus de voyageurs ont envie de prendre le train pour partir en vacances, évaluons précisément les pratiques des clientèles, prenons le temps de les écouter sur leurs besoins de services en termes de mobilité, et mettons en place l’offre et les services qui permettra de réduire le gap entre l’intention et le passage à l’acte.

Les tendances s’évaluent après, plus qu’elles ne s’inventent avant, et comme le disait justement Antoine de Saint-Exupéry, le futur il ne s’agit pas tant de le prédire mais de le rendre possible !

Président de la société de conseils Futourism :

Forestier et géographe de formation, Jean Pinard a toujours travaillé dans le secteur des sports et du tourisme.
Moniteur de kayak, chauffeur de bus, guide, gestionnaire de sites touristiques, directeur de CDT et de CRT (Auvergne et Occitanie), Jean Pinard est redevenu consultant, son premier métier à la SCET, à la fin de ses études.