Manor Loisirs : le nouveau réseau aux grandes ambitions ! [ABO]

Au moment d'ouvrir ce 29e congrès, Grégory Mavoian a promis "une ribambelle d'annonces" à ses adhérents.

Il a tenu parole, alors même que nous sommes à la mi-temps de la partie.

Celui qui a donné des pistes pour entrer dans la nouvelle ère d'un business modèle repensé, en raison de l'adoption de la norme NDC, a déjà passé la surmultipliée pour livrer à ses adhérents les outils nécessaires à la transition.

"L'année 2024 est celle du retour à la normale. Je note un arrêt de la fragmentation de l’offre, nous la reconsolidons.

Ce que j'observe aussi comme tendance c'est le retour en force du client. Nous l’avions perdu de vue durant le covid, puis en 2023, il a été chahuté par les prix, les problèmes de ressources humaines.

La compétition sera de plus en plus importante, il faudra se tenir prêt," a introduit le président de Manor.

Et pour être prêt, le réseau annonce un partenariat avec WonderMiles.

La solution sorte de marketplace du transport, proposant l'ensemble des contenus disponibles, du GDS à NDC, en passant par le train, sera donc disponible aux 157 agences adhérentes.

"Nous utilisons la technologie de Wondermiles, mais nous avons cocréé la solution ensemble.

Nous avons fait un appel d’offres, nous avons scruté les outils, y compris à l’étranger. Nous avons choisi celui qui partage la même vision d'avenir du métier.

Nous allons tendre vers ce type de partenariat," explique le président.

Et puisqu'il y a autant de normes NDC que de compagnies, l'enjeu est donc de centraliser l'offre dans un seul et même endroit. Le parcours pour l'agent de voyages et le client est sans couture et homogène.

Pendant que toute l'industrie se focalise sur le prix, WonderMiles lui a travaillé sur la technologie entre le tarif et l'utilisateur final. La place de marché ne se veut pas une concurrente de NDC X, la solution d'Amadeus, ce que réfute le DG de l'ancien GDS.

"Nous voulons devenir l’agrégateur référence dans le monde. La plupart des TMC ont fait le choix d’Amadeus. Wondermiles est bien un concurrent de NDC X.

NDC permet l’arrivée de nouveaux entrants, le marché décidera. Aujourd’hui nous avons 29 compagnies aériennes et NDC est notre priorité numéro 1 sur la distribution," a tenu à recadrer Frederic Saunier.

Reste à savoir si les agences de voyages vont adhérer à la proposition.

D'autant que se pose la question du business modèle de ce secteur. Avec ce changement de paradigme, l'industrie est fortement ébranlée. Auparavant les agents recevaient de l'argent de la part des GDS sur chaque tronçon vendu, demain ces derniers ne leur verseront plus rien.

Aujourd'hui, les compagnies aériennes versent des incentives pour que la distribution physique adopte NDC. Rien ne dit que demain ce schéma sera pérennisé.

Pour l'heure, d'après un acteur important du voyage d'affaires, la rémunération est quasi similaire à ce que fournissait les Amadeus, Sabre ou autres.

Pour lui, les transporteurs, comme Air France, n'ont pas intérêt à se couper de ces revendeurs, sous peine de se retrouver avec pour seuls interlocuteurs des GAFAM, avec lesquels ils ne pourront pas négocier.

Et comme une annonce n'arrive jamais seule, ce 29e congrès a été marqué par l'alliance entre 3 géants de l'industrie.

Manor, le Groupe Salaün et Prêt-à-Partir ont décidé d'unir leurs forces sur le marché des loisirs.

En juin dernier, Grégory Mavoian dévoilait le rapprochement entre son réseau et le GIE PAPMUT, pour créer une nouvelle entité baptisée GIE Manor Loisirs.

"Je suis heureux d’avoir l’occasion de rendre service au réseau Manor qui a tant apporté à Prêt-à-Partir. C’est une étape historique dans la constitution de l’Autre Réseau, celui qui prend soin de ses fournisseurs et ne leur fait pas concurrence," avait commenté à l'époque François Piot.

A l'été 2024, le GIE représentait 300 agences pour 250 millions de volumes d'affaires. Le changement de saison va faire gonfler les chiffres.

Grâce à l'arrivée du groupe Salaün, via une "alliance commerciale", il va dépasser le cap des 430 points de vente, pour un volume d'affaires de 500 millions d'euros.

A titre de comparaison, Leclerc Voyages réalise un volume de 700 millions quand Havas tourne autour de 400 millions. En l'espace de 3 signatures, Manor Loisirs arrive à sa hauteur

"L'idée est maintenant de négocier avec les tour-opérateurs pour obtenir de meilleurs contrats. Le bouquet de la mariée représentera 5 millions de commissions supplémentaires à négocier avec les fournisseurs," affirme le patron nancéien.

Ce montant ne sort pas du chapeau : il correspond aux conditions les mieux-disantes appliquées par les producteurs à Salaün et Prêt-à-Partir. Demain, l'ensemble des adhérents de Manor en bénéficiera également.

Contre cette manne, les producteurs exigent toujours une croissance de leurs ventes et un "contrepoids", par rapport aux réseaux existants et à la concentration qui grandit dans le secteur.

Et pour tenir ses promesses, Manor va devoir réussir un tour de force sans précédent : piloter ses ventes.

Il doit casser l'image, même au sein de ses troupes, d'un réseau orienté vers le business travel et ne faisant peu ou pas de loisirs.

"Nous allons nous engager dans de la croissance, en allant chercher de nouveaux adhérents, puis réaliser des actions et de la communication interne.

Nous voulons construire une relation durable qui sera équilibrée, sur le plan de la qualité pour le client, et sur le plan financier pour nous," poursuit le dirigeant.

Pour cela, Manor Loisirs et ses équipes ont d'ores et déjà noué des contacts avec les tour-opérateurs pour repartir sur de nouvelles bases et signer des contrats de référencement.

Les premiers échanges seraient très positifs et des annonces devraient avoir lieu très prochainement. Après les voyagistes du groupe Salaün, d'autres sont dans le pipe.

"Cela va prendre plusieurs mois.

L'ampleur de la tâche consiste à tout remettre à plat. Après sur le nombre de producteurs référencés, n'oublions pas que nous avons déjà un panel existant.

Par principe nous discutons avec tout le monde. Puis nous avons comme atouts, qu'on leur coûtera moins cher et ne leur fera pas de concurrence" assure le patron de Prêt-à-Partir.

Bien que les producteurs soient mis à contribution, ils devront améliorer leurs commissions. Les patrons présents ont tous approuvé l'initiative, même ceux appartenant à des réseaux qui entreront donc en concurrence frontale avec Manor Loisirs.

A l'image d'un Austral Lagon qui entend développer son portefeuille client avec les 430 agences référencées.

"Je ne suis pas sûr d'avoir besoin de ce contrepoids, je serais ravi de faire plus de business avec les agences de ces 3 entités. Nous avons déjà entamé les discussions, elles devraient aboutir prochainement.

Nous sommes prêts à donner plus, pour gagner plus," a commenté Hélion de Villeneuve.

Nous verrons maintenant quel accueil réserveront les réseaux concurrents, mais notre petit doigt nous dit qu'il pourrait être glacial. En attendant, Manor Loisirs n'ambitionne pas de créer sa propre centrale de paiements.

La proposition a été faite lors d'une précédente assemblée générale, mais n'a pas été retenue.

"Trois réseaux s'unissent, puis nous avons en parallèle un mastodonte sur le marché français.

Est-ce que nous allons vers une super consolidation ? Ou est-ce qu'à l'inverse, des agences indépendantes vont continuer d'exister au milieu de tout ça ?" a questionné Aurélie Soulat, la directrice des ventes France de Costa.

Pour François Piot, l'avenir des acteurs indépendants est en jeu, d'autant plus face à la concentration qui sévit dans l'industrie. Pour lui, le "véritable réseau indépendant est Manor".