Les plus grands experts et responsables du transport aérien ont offert leur expertise lors du 11e Dîner de Gala du think thank du voyage d'affaires de Marco Polo.
Le dernier volet du rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) publié lundi 4 avril, donne des sueurs froides.
Les scientifiques soulignent que pour limiter le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle, le monde doit atteindre la neutralité carbone d'ici 2050.
L'aérien doit prendre sa part et le mouvement est en marche comme ont pu le dire des hauts responsables du secteur réunis le 22 mars par Marco Polo.
Les scientifiques soulignent que pour limiter le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle, le monde doit atteindre la neutralité carbone d'ici 2050.
L'aérien doit prendre sa part et le mouvement est en marche comme ont pu le dire des hauts responsables du secteur réunis le 22 mars par Marco Polo.
Du côté des voyageurs d’affaires, l’attente se renforce
Le chiffre communiqué par Anne Rigail, directrice générale d'Air France, est spectaculaire : " 76% de nos clients sont engagés dans une trajectoire de décarbonation avec des organismes de certification. Tous nos clients affaires regardent leur Scope 3".
Elle ajoute : "Aujourd'hui, le transport aérien représente 2,6% des émissions de CO₂, mais si on ne fait rien ce sera plutôt 20% à l’horizon 2050, compte tenu de la croissance du secteur. Nous disposons de deux leviers pour progresser : le changement de la flotte, avec les A350 et les A220, et les carburants durables. Notre mandat d'incorporation est actuellement de 1%. Nos clients nous en demandent deux fois plus mais ces carburants sont six à sept fois plus chers".
Résultat : "Nous n’arrivons pas à répondre à la demande de nos clients corporate qui veulent voyager avec du carburant durable. C'est tout l'enjeu pour la filière et l'industrie d'arriver à répondre à cette attente."
Elle note en parallèle une désaffection de la clientèle affaires sur la liaison Brest - Orly au profit du train, avec un trajet pourtant supérieur à trois heures depuis Paris. "Il faut accompagner ces mouvements en proposant à nos clients une intermodalité, des connexions avec les opérateurs de train".
Marc Rochet, patron d'Air Caraïbes / French Bee, enchaîne : "Il y a effectivement le renouvellement de la flotte et le SAF. Mais si vous voulez en trouver à Orly, bon courage, mais cela viendra !"
Pour ce grand expert des questions aériennes, "il ne faut pas se lancer dans des discours irrationnels mais être réalistes".
Il argumente : "Le digital permet beaucoup, notamment dans la gestion de la trajectoire des avions. Nos personnels doivent être mis à contribution pour encore consommer moins, tout comme les aéroports. J'essaie de mettre des groupes électriques à Orly et je n'y arrive pas. Il faut être volontariste et je trouve qu’on ne l’est pas assez".
À se demander, aussi, si c'est bien utile, par exemple, de conserver un aéroport à Tarbes et un autre à Pau. La France dispose de 120 aéroports commerciaux, soit le record de densité en Europe.
Jean-Pierre Sauvage, président du Bar, abonde : "Des arbitrages vont être faits par la clientèle affaires, les échanges intra-entreprises se feront majoritairement en visio et ce qui relève de la relation commerciale va reprendre, avec un trafic plus ou moins normal.
Les projections, à terme, c'est une baisse du trafic affaires entre 20 et 25%. Il y a une accélération des comportements RSE dans les entreprises, il va falloir y être très attentif pour mesurer les impacts et, conséquemment, sur la demande en transport aérien."
Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, pose le même constat : "Le monde a changé en juillet 2019, sous l'influence, peut-être de Greta Thunberg… Nous pensions, comme le disait alors Louis Gallois, alors patron d'Airbus, que la dernière goutte de kérosène serait pour l’aérien. Ce monde est terminé".
Elle ajoute : "Aujourd'hui, le transport aérien représente 2,6% des émissions de CO₂, mais si on ne fait rien ce sera plutôt 20% à l’horizon 2050, compte tenu de la croissance du secteur. Nous disposons de deux leviers pour progresser : le changement de la flotte, avec les A350 et les A220, et les carburants durables. Notre mandat d'incorporation est actuellement de 1%. Nos clients nous en demandent deux fois plus mais ces carburants sont six à sept fois plus chers".
Résultat : "Nous n’arrivons pas à répondre à la demande de nos clients corporate qui veulent voyager avec du carburant durable. C'est tout l'enjeu pour la filière et l'industrie d'arriver à répondre à cette attente."
Elle note en parallèle une désaffection de la clientèle affaires sur la liaison Brest - Orly au profit du train, avec un trajet pourtant supérieur à trois heures depuis Paris. "Il faut accompagner ces mouvements en proposant à nos clients une intermodalité, des connexions avec les opérateurs de train".
Marc Rochet, patron d'Air Caraïbes / French Bee, enchaîne : "Il y a effectivement le renouvellement de la flotte et le SAF. Mais si vous voulez en trouver à Orly, bon courage, mais cela viendra !"
Pour ce grand expert des questions aériennes, "il ne faut pas se lancer dans des discours irrationnels mais être réalistes".
Il argumente : "Le digital permet beaucoup, notamment dans la gestion de la trajectoire des avions. Nos personnels doivent être mis à contribution pour encore consommer moins, tout comme les aéroports. J'essaie de mettre des groupes électriques à Orly et je n'y arrive pas. Il faut être volontariste et je trouve qu’on ne l’est pas assez".
À se demander, aussi, si c'est bien utile, par exemple, de conserver un aéroport à Tarbes et un autre à Pau. La France dispose de 120 aéroports commerciaux, soit le record de densité en Europe.
Jean-Pierre Sauvage, président du Bar, abonde : "Des arbitrages vont être faits par la clientèle affaires, les échanges intra-entreprises se feront majoritairement en visio et ce qui relève de la relation commerciale va reprendre, avec un trafic plus ou moins normal.
Les projections, à terme, c'est une baisse du trafic affaires entre 20 et 25%. Il y a une accélération des comportements RSE dans les entreprises, il va falloir y être très attentif pour mesurer les impacts et, conséquemment, sur la demande en transport aérien."
Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, pose le même constat : "Le monde a changé en juillet 2019, sous l'influence, peut-être de Greta Thunberg… Nous pensions, comme le disait alors Louis Gallois, alors patron d'Airbus, que la dernière goutte de kérosène serait pour l’aérien. Ce monde est terminé".
L'ère des ingénieurs
Augustin de Romanet souligne : "Nous sommes rentrés dans l'ère des ingénieurs. En 2040, il y aura trois types d'avion : les avions électriques qui existent déjà, les avions à hydrogène - Airbus va démontrer que cela peut être une réalité en 2026-, et ceux qui volent avec des carburants durables.
Les bio-carburants, déjà, avec l'huile de cuisson et de récupération des graisses animales, et les électro-carburants, qui arriveront plus tard, qui sont des carburants synthétiques qui ne proviennent pas de terres agricoles et qui pourraient être l'avenir de l'aviation au-delà de 2040".
Il insiste : "Nos compatriotes ne supportent plus un transport aérien réputé être émetteur de CO₂. Nous faisons modestement notre part du chemin, on va électrifier tous nos véhicules de piste et se préparer à produire de l'hydrogène, si d'aventure, l'avion à hydrogène devient une réalité. Nous sommes délibérément engagés dans cette voie".
Jean-Pierre Sauvage précise : "La forêt à l’échelle planétaire peut absorber 11 milliards de tonnes de CO₂, les émissions mondiales s’élèvent à 25 milliards. On est loin du compte pour combler ce décalage. Le SAF ne sera donc pas suffisant. Formulons l'augure que l'avion à hydrogène fonctionne dès 2035 comme l'a annoncé le président d'Airbus, Guillaume Faury".
Les bio-carburants, déjà, avec l'huile de cuisson et de récupération des graisses animales, et les électro-carburants, qui arriveront plus tard, qui sont des carburants synthétiques qui ne proviennent pas de terres agricoles et qui pourraient être l'avenir de l'aviation au-delà de 2040".
Il insiste : "Nos compatriotes ne supportent plus un transport aérien réputé être émetteur de CO₂. Nous faisons modestement notre part du chemin, on va électrifier tous nos véhicules de piste et se préparer à produire de l'hydrogène, si d'aventure, l'avion à hydrogène devient une réalité. Nous sommes délibérément engagés dans cette voie".
Jean-Pierre Sauvage précise : "La forêt à l’échelle planétaire peut absorber 11 milliards de tonnes de CO₂, les émissions mondiales s’élèvent à 25 milliards. On est loin du compte pour combler ce décalage. Le SAF ne sera donc pas suffisant. Formulons l'augure que l'avion à hydrogène fonctionne dès 2035 comme l'a annoncé le président d'Airbus, Guillaume Faury".
Un accès bas carbone depuis/vers les aéroports
L'aéroport du futur contribuera aussi à la décarbonation du secteur. Augustin de Romanet en pose les contours : "nous essaierons de rendre la voiture de moins en moins proche des terminaux et nous réfléchissons à un accès, soit par des transports en commun, soit par des parkings déportés pour désinciter à prendre la voiture".
Pour l'instant, comme le souligne Anne Rigail, nous sommes loin du compte.
"Quand nous avons arrêté les liaisons entre Orly-Bordeaux, Nantes ou Lyon, les clients pour qui le train n'était pas adapté à leur trajet, ont hurlé à cause de la faible liaison vers Paris depuis CDG. Ils ont aussi dit : « on encombre l'A1, on émet du CO₂ »".
Le CDG Express ne devrait entrer en service qu'en 2026 alors que le prolongement de la ligne de métro 14 reliera Orly au sud de Paris en 2024.
Le temps que le voyageur d’affaires perdra - peut-être - à se rendre aux aéroports sera compensé par des procédures d’enregistrement et de contrôle simplifiées.
"Le rêve, c'est la biométrie et la smartisation" poursuit Augustin de Romanet, grâce à "l'enregistrement au domicile de votre carte d'embarquement avec votre visage, ce qui permettra ensuite au voyageur de franchir toutes les étapes, y compris celle de la police".
Mais, "cela suppose des discussions avec la CNIL et aussi la police aux frontières. Notre travail consiste à rendre automatiques tous ces contrôles, il y a des essais à Orly qui sont très encourageants, les personnes sont d'accord pour présenter leur visage".
Reste qu’à court terme, Jean-Pierre Sauvage s'inquiète : "Nous avons ce problème du contrôle automatique aux frontières prévu en septembre 2022, on prévoit une grosse catastrophe en termes d'attente aux frontières.
Nous avons demandé à Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, de sursoir à cette mesure. Il s'agit de bien intégrer la dimension économique du transport aérien par rapport au PIB de la France, certains gouvernants l'ont complètement oublié".
Marc Rochet poursuit : "À un moment, il faudra alléger les mesures. Passer 1h30 à attendre à l'arrivée et au départ deviendra insupportable".
Pour l'instant, comme le souligne Anne Rigail, nous sommes loin du compte.
"Quand nous avons arrêté les liaisons entre Orly-Bordeaux, Nantes ou Lyon, les clients pour qui le train n'était pas adapté à leur trajet, ont hurlé à cause de la faible liaison vers Paris depuis CDG. Ils ont aussi dit : « on encombre l'A1, on émet du CO₂ »".
Le CDG Express ne devrait entrer en service qu'en 2026 alors que le prolongement de la ligne de métro 14 reliera Orly au sud de Paris en 2024.
Le temps que le voyageur d’affaires perdra - peut-être - à se rendre aux aéroports sera compensé par des procédures d’enregistrement et de contrôle simplifiées.
"Le rêve, c'est la biométrie et la smartisation" poursuit Augustin de Romanet, grâce à "l'enregistrement au domicile de votre carte d'embarquement avec votre visage, ce qui permettra ensuite au voyageur de franchir toutes les étapes, y compris celle de la police".
Mais, "cela suppose des discussions avec la CNIL et aussi la police aux frontières. Notre travail consiste à rendre automatiques tous ces contrôles, il y a des essais à Orly qui sont très encourageants, les personnes sont d'accord pour présenter leur visage".
Reste qu’à court terme, Jean-Pierre Sauvage s'inquiète : "Nous avons ce problème du contrôle automatique aux frontières prévu en septembre 2022, on prévoit une grosse catastrophe en termes d'attente aux frontières.
Nous avons demandé à Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, de sursoir à cette mesure. Il s'agit de bien intégrer la dimension économique du transport aérien par rapport au PIB de la France, certains gouvernants l'ont complètement oublié".
Marc Rochet poursuit : "À un moment, il faudra alléger les mesures. Passer 1h30 à attendre à l'arrivée et au départ deviendra insupportable".
Des raisons d’espérer
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Tout n'est pas noir, loin de là, comme l’explique Anne Rigail : "La crise Covid a accéléré le renouvellement de la flotte, avec des cabines modernes, des écrans dernière génération et du wifi à bord.
Nous préparons des offres durables avec des menus végétariens "mangeables" et évitons le gaspillage en permettant aux clients de choisir ce qu'il va manger".
Pour Marc Rochet, le secteur n'échappera néanmoins pas à la densification des avions pour proposer des tarifs abordables.
Elle sera compensée par un plus grand confort. "Sur nos A350, on a mis en classe éco dix sièges de front, nous sommes les seuls, et quand vous densifiez un avion, c'est aussi plus écolo".
Nous préparons des offres durables avec des menus végétariens "mangeables" et évitons le gaspillage en permettant aux clients de choisir ce qu'il va manger".
Pour Marc Rochet, le secteur n'échappera néanmoins pas à la densification des avions pour proposer des tarifs abordables.
Elle sera compensée par un plus grand confort. "Sur nos A350, on a mis en classe éco dix sièges de front, nous sommes les seuls, et quand vous densifiez un avion, c'est aussi plus écolo".