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IA et droits d’auteur : vos créations sont-elles vraiment protégées ? [ABO]

Générations par IA et propriété intellectuelle


L’essor de l’intelligence artificielle soulève des enjeux juridiques inédits en matière de droits d’auteur. Qui peut revendiquer la propriété des contenus générés par IA ?


Rédigé par le Jeudi 13 Mars 2025

IA et droits d’auteur : vos créations sont-elles vraiment protégées ? - Photo : Depositphotos.com @EvgeniyShkolenko
IA et droits d’auteur : vos créations sont-elles vraiment protégées ? - Photo : Depositphotos.com @EvgeniyShkolenko
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L’intelligence artificielle bouleverse de nombreux secteurs, dont celui de la création artistique et du contenu numérique.

En générant des images, des textes ou encore des vidéos, ces technologies interrogent le cadre juridique existant en matière de propriété intellectuelle et de droits d’auteur. Les législations actuelles, principalement fondées sur l’intervention humaine, sont mises à l’épreuve par ces innovations.

À travers un webinaire organisé en partenariat avec TourMaG, l’avocate en droit de la propriété intellectuelle Clara Viguié a analysé les implications des IA génératives sur le droit d’auteur et les précautions à adopter pour éviter les litiges.


Le cadre juridique actuel et ses limites face à l’IA

Le droit d’auteur repose sur deux critères fondamentaux : l’originalité et la tangibilité de la création. En France comme dans de nombreux pays, une création est protégée dès lors qu’elle présente une empreinte intellectuelle propre à son auteur. Une idée ou un concept ne peuvent être protégés par les droits d'auteur. Cependant, l’IA remet en question cette approche puisqu’elle génère des œuvres d’une manière partiellement aléatoire, sans intervention humaine significative.

Clara Viguié rappelle “qu’il faut vraiment qu'il y ait un humain qui soit derrière la création pour que la création soit protégée”. Aux États-Unis, la justice a déjà refusé d’accorder une protection à des œuvres créées exclusivement par IA, faute d’auteur humain clairement identifiable. En Europe, cette question est encore en débat, mais la position dominante reste la même : une IA seule ne peut être titulaire de droits d’auteur.

Toutefois, la situation devient plus complexe lorsque l’humain intervient en complément de l’IA. Si un utilisateur retouche une image générée par un modèle IA, modifie substantiellement un texte ou adapte une musique issue d’un programme génératif, une protection par des droits d’auteur peut être envisageable. Le niveau d’implication requis pour revendiquer des droits reste encore flou, et il appartient aux tribunaux d’établir ces limites. Aux Etats-Unis par exemple, une œuvre générée par IA nommée “A single piece of american cheese” a été protégée par des droits d’auteur, l’artiste ayant retouché 35 fois la proposition de l’IA utilisée.

Le règlement européen sur l’intelligence artificielle pourrait à terme clarifier certains aspects de cette problématique. En attendant, les professionnels doivent se montrer prudents quant à l’exploitation commerciale des contenus produits par IA.

Contenus générés et risque de contrefaçon

L’IA générative repose sur des bases de données d’œuvres préexistantes, souvent protégées par le droit d’auteur. Cela pose un risque de contrefaçon et de violation des droits d’auteur, notamment lorsque les créations produites sont trop proches d’œuvres existantes.

L’exception de fouille de texte est un cadre légal qui permet l’exploitation de données, y compris celles protégées par le droit d’auteur, pour entraîner des outils d’intelligence artificielle. Cette pratique, autorisée au niveau européen et en droit français, consiste à analyser un large volume de contenus afin de développer de nouveaux modèles et outils numériques. Cette exploitation peut être réalisée à des fins commerciales ou non, sans restriction quant aux acteurs impliqués.

Toutefois, les créateurs ont la possibilité de s’opposer à l’utilisation de leurs œuvres via une clause d’exclusion, appelée « opt-out ». Cette opposition doit être explicitement exprimée, notamment dans les conditions générales d’utilisation des plateformes en ligne. Ainsi, un site internet peut interdire l’utilisation de ses contenus par des IA à des fins d’entraînement.

Selon Clara Viguié, la contrefaçon ne nécessite pas forcément d’intention frauduleuse. Si une création ressemble trop à une œuvre protégée, elle peut être considérée comme une copie. En pratique, cela signifie qu’un texte généré par IA reprenant des passages d’un livre sous droit d’auteur ou une image ressemblant à une photographie protégée peut entraîner des poursuites judiciaires.

Pour limiter ces risques, plusieurs bonnes pratiques sont recommandées :

  • Vérifier la provenance des données d’entraînement des IA utilisées. Certaines plateformes garantissent une utilisation conforme au droit d’auteur, tandis que d’autres exploitent des bases de données non vérifiées
  • Effectuer une analyse comparative pour détecter d’éventuelles similitudes avec des œuvres protégées. Des outils comme les détecteurs de plagiat ou les systèmes de reconnaissance d’images peuvent aider
  • Utiliser des modèles d’IA formés sur des contenus libres de droits ou produits spécifiquement pour des usages commerciaux légitimes

La jurisprudence est encore en construction sur ces questions.

Responsabilité des utilisateurs et encadrement légal

L’utilisation d’IA dans la production de contenus soulève aussi la question de la responsabilité juridique. Lorsqu’un contenu généré par IA enfreint le droit d’auteur, qui est responsable ? Le créateur, l’éditeur ou la société qui a développé l’algorithme ?

Dans l’état actuel du droit, c’est l’utilisateur final qui assume la responsabilité en cas de violation. Celui qui exploite une œuvre générée par IA est juridiquement responsable de son contenu, même s’il n’a pas intentionnellement copié une œuvre protégée. Cela signifie qu’une entreprise utilisant des visuels produits par IA dans ses supports de communication pourrait être poursuivie si ces images sont jugées trop proches d’œuvres existantes.

Face à ces incertitudes, plusieurs pays envisagent de renforcer l’encadrement légal. L’Union européenne, avec l’IA Act, impose des obligations de transparence aux développeurs, notamment en matière de traçabilité des contenus. Dans l’attente d’une harmonisation, les professionnels doivent donc prendre des précautions supplémentaires dans l’utilisation de ces technologies.

Bonnes pratiques pour les entreprises utilisant l’IA

Face aux risques juridiques, les entreprises qui utilisent l’IA doivent adopter une stratégie de précaution.

Parmi les mesures recommandées :

  • Encadrer l’usage des outils d’IA en interne, en définissant des règles claires sur les types de contenus acceptables
  • Mentionner explicitement dans les conditions d’utilisation d’un site web que ses contenus ne peuvent être utilisés pour entraîner des modèles d’IA. Cette mesure vise à limiter l’exploitation non autorisée de contenus protégés
  • Former les équipes aux enjeux légaux de l’IA pour éviter des infractions involontaires au droit d’auteur
  • Collaborer avec des experts juridiques pour valider les usages spécifiques des contenus générés

Les entreprises doivent également surveiller l’évolution de la législation pour adapter leurs pratiques en conséquence. Avec un cadre juridique encore en construction, la prudence reste la meilleure approche.



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