La concurrence a mis à mal la compétitivité et fait fondre la légitimité de la démarche. La pandémie est venue ensuite rebattre les cartes du transport aérien - DR : Air Austral
Bien entendu, on comprend fort bien que l'Île de la Réunion souhaite conserver Air Austral, compagnie emblématique, et que le personnel veuille conserver son emploi.
Pour la Région, c’est à la fois un moyen de marquer son identité ultramarine mais aussi de s’assurer des intérêts bien compris de la desserte et de la continuité territoriale.
Éloignée de plus de 9 000 km de la métropole, l’Île et sa spécificité méritaient un traitement spécial en matière de transport. Mais les évolutions du secteur ont peu à peu rendu ce postulat moins pertinent. Non pas sur le principe, qui demeure, mais sur ses modalités.
La concurrence a mis à mal la compétitivité et fait fondre la légitimité de la démarche. La pandémie est venue ensuite rebattre les cartes du transport aérien.
Face à un déficit aggravé par des choix stratégiques contestables, des tentatives de mariage avortées et des dessertes hasardeuses au fil des années, il urgeait de trouver des solutions.
Pour la Région, c’est à la fois un moyen de marquer son identité ultramarine mais aussi de s’assurer des intérêts bien compris de la desserte et de la continuité territoriale.
Éloignée de plus de 9 000 km de la métropole, l’Île et sa spécificité méritaient un traitement spécial en matière de transport. Mais les évolutions du secteur ont peu à peu rendu ce postulat moins pertinent. Non pas sur le principe, qui demeure, mais sur ses modalités.
La concurrence a mis à mal la compétitivité et fait fondre la légitimité de la démarche. La pandémie est venue ensuite rebattre les cartes du transport aérien.
Face à un déficit aggravé par des choix stratégiques contestables, des tentatives de mariage avortées et des dessertes hasardeuses au fil des années, il urgeait de trouver des solutions.
Une bouée de sauvetage contre une restructuration
Deux groupes se sont positionnés : Dubreuil (Air Caraïbes) et Corsair. Le Gouvernement ne voulait pas de la candidature du premier, malgré des manifestations d’intérêt répétées.
Pascal de Izaguirre, patron de Corsair, lui a été préféré. Mais l’accord sur le principe diverge dans ses modalités : le CIRI poussait vers une fusion capitalistique avec Corsair et maniait la carotte tout en agitant le bâton de la dette.
Les négociations ont traîné en longueur, car chez Air Austral on ne voulait pas d’une absorption qui signifierait, selon les organisations syndicales, une disparition pure et simple.
Or, l’obstacle était de taille car il réunissait toutes les composantes d’un conflit politique et social, alors que des échéances électorales approchaient.
Sans solution rapide, Air Austral dont la dette se creusait de jour en jour, irait dans le mur. L’Europe s’en est mêlée aussi au début de l’année, et a donné son feu vert au gouvernement français, pour une bouée de sauvetage sous forme d’une aide de 20 millions d'euros.
Mais une épée de Damoclès était désormais suspendue au-dessus de la compagnie australe : ce soutien était conditionné à la "présentation d'un plan de restructuration permettant de rétablir la viabilité à long terme de l'entreprise," dans les 6 mois.
Pascal de Izaguirre, patron de Corsair, lui a été préféré. Mais l’accord sur le principe diverge dans ses modalités : le CIRI poussait vers une fusion capitalistique avec Corsair et maniait la carotte tout en agitant le bâton de la dette.
Les négociations ont traîné en longueur, car chez Air Austral on ne voulait pas d’une absorption qui signifierait, selon les organisations syndicales, une disparition pure et simple.
Or, l’obstacle était de taille car il réunissait toutes les composantes d’un conflit politique et social, alors que des échéances électorales approchaient.
Sans solution rapide, Air Austral dont la dette se creusait de jour en jour, irait dans le mur. L’Europe s’en est mêlée aussi au début de l’année, et a donné son feu vert au gouvernement français, pour une bouée de sauvetage sous forme d’une aide de 20 millions d'euros.
Mais une épée de Damoclès était désormais suspendue au-dessus de la compagnie australe : ce soutien était conditionné à la "présentation d'un plan de restructuration permettant de rétablir la viabilité à long terme de l'entreprise," dans les 6 mois.
Combien de temps tiendra encore l'entreprise ?
Faute d’un projet de restructuration financière avant le 30 juin 2022, c’était le dépôt de bilan assuré.
La pilule était dure à avaler pour l’Etat, à qui on demandait de s’asseoir sur plus de 300 millions d’euros, autrement dit, l’intégralité de la dette. Surtout qu’aucune de ses demandes n’avait été exaucée.
Deux fonds d’investissements (PIMCO, Tikehau Ace Capital) qui avaient étudié le dossier ont aussi jeté l'éponge. Au finish, on apprenait la semaine dernière que le Groupe Deleflie, ainsi que des investisseurs locaux, avaient mis la main à la poche pour sauver in extremis le transporteur de la banqueroute.
La question qui se pose désormais est de savoir combien de temps tiendra encore l'entreprise ? Car, selon moi, aucun des problèmes de fond n’a été réglé par ce projet de rachat.
La concurrence est toujours aussi féroce, voire davantage, et le prix du kérosène a explosé, deux éléments dont la conjugaison ne présage rien de bon pour les mois à venir.
Si l’on y ajoute la cohérence de la flotte et la stratégie de ses dessertes dans la région, avec Mayotte et Madagascar, on comprend mieux les défis auxquels sera confrontée Air Austral dans les mois à venir.
Ce que l’on peut dire, c’est que ce rachat tient davantage de l’opération politique que de la restructuration capitalistique.
Et que faute d’une véritable vision sur la continuité territoriale ultramarine et des moyens nécessaires pour la mettre en œuvre, nous n’avons repoussé encore le tas de sable au lieu de le déblayer.
La pilule était dure à avaler pour l’Etat, à qui on demandait de s’asseoir sur plus de 300 millions d’euros, autrement dit, l’intégralité de la dette. Surtout qu’aucune de ses demandes n’avait été exaucée.
Deux fonds d’investissements (PIMCO, Tikehau Ace Capital) qui avaient étudié le dossier ont aussi jeté l'éponge. Au finish, on apprenait la semaine dernière que le Groupe Deleflie, ainsi que des investisseurs locaux, avaient mis la main à la poche pour sauver in extremis le transporteur de la banqueroute.
La question qui se pose désormais est de savoir combien de temps tiendra encore l'entreprise ? Car, selon moi, aucun des problèmes de fond n’a été réglé par ce projet de rachat.
La concurrence est toujours aussi féroce, voire davantage, et le prix du kérosène a explosé, deux éléments dont la conjugaison ne présage rien de bon pour les mois à venir.
Si l’on y ajoute la cohérence de la flotte et la stratégie de ses dessertes dans la région, avec Mayotte et Madagascar, on comprend mieux les défis auxquels sera confrontée Air Austral dans les mois à venir.
Ce que l’on peut dire, c’est que ce rachat tient davantage de l’opération politique que de la restructuration capitalistique.
Et que faute d’une véritable vision sur la continuité territoriale ultramarine et des moyens nécessaires pour la mettre en œuvre, nous n’avons repoussé encore le tas de sable au lieu de le déblayer.
L'éditorial de Jean Da Luz
Directeur de la rédaction - TourMaG.com
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